Lire : "Un homme, un vrai", de Tom Wolfe29/09/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/09/une-1681.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

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Lire : "Un homme, un vrai", de Tom Wolfe

Le dernier roman de l'auteur du Bûcher des Vanités vient d'être publié en édition de poche. C'est à la fois une satire, féroce et drôle, de la bourgeoisie américaine et un réquisitoire contre l'exploitation et le racisme.

Le roman a pour cadre Atlanta, la cinquième plus grande ville des Etats-Unis, et celle qui compte la plus importante population noire - 75 % des habitants de la ville. Le maire, une grande partie de l'administration et une proportion de notables et de petits bourgeois probablement plus importante que dans le reste du pays, sont noirs. Mais la grande bourgeoisie, elle, reste blanche. Atlanta était une des capitales de l'Amérique sudiste et esclavagiste du temps de la guerre de Sécession ; les Blancs y sont encore marqués par le racisme et un complexe de supériorité des plus primaires.

Le roman raconte trois histoires différentes qui s'entrecroisent : celle de Charles Croker, promoteur immobilier multimilliardaire arrogant et mégalomane qui se retrouve au bord de la faillite à la suite d'opérations financières douteuses. Pour pouvoir conserver sa plantation de 12 000 hectares dans laquelle il se rend quelques week-ends par an, il licencie un millier de travailleurs dans ses entrepôts frigorifiques. C'est aussi l'histoire de Conrad, manutentionnaire licencié dans un de ces entrepôts. Et c'est celle du maire, allié à un avocat, qui tente d'éviter des émeutes raciales après qu'une star du football, enfant du ghetto, eut été accusée (à tort) d'avoir violé la fille d'un grand bourgeois blanc.

Presque personne n'est épargné dans ce livre. A travers Charles Croker et ses amis, Wolfe fait le portrait d'hommes d'affaires arrogants, racistes, misogynes, cherchant à tout moment à exalter leur virilité de primates en épousant à soixante ans des poupées de luxe de vingt-cinq. Quant aux rapports entre ces différents bourgeois décrits par l'auteur, ils donnent une idée juste de l'expression " requins de la finance ".

La petite bourgeoisie noire aisée, cultivée, claire de peau (sauf en période électorale où le maire fait du golf pour bronzer afin de gagner des voix dans les quartiers noirs !), en prend elle aussi pour son grade. Mais tous les efforts qu'ils déploient ne parviennent cependant qu'à les faire tolérer par les Blancs.

Le seul milieu où existent des relations humaines d'entraide se trouve à l'autre bout de l'échelle sociale. On suivra la descente aux enfers de Conrad, depuis les entrepôts aux conditions de travail inhumaines, jusqu'à son licenciement et son séjour dans un pénitencier où la violence entre les gangs fait office de loi.

Le roman aurait cependant gagné à être moins long (il en devient parfois un peu pesant) et, surtout, l'auteur aurait pu nous faire grâce de la fin, où le capitaliste Croker abandonne tous ses biens pour rejoindre son ex-employé Conrad dans sa folie mystique et religieuse ! Mais il n'en reste pas moins intéressant.

Pierre VANDRILLE

"Un homme, un vrai", de Tom Wolfe, chez Pocket. 1 000 pages, 55 francs.

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