La feuille de vignette de Fabius08/09/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/09/une-1678.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

La feuille de vignette de Fabius

Le plan Fabius prévoit la fin du paiement, dès cette année, de la vignette automobile, taxe impopulaire que les automobilistes payent depuis 44 ans.

C'est le gouvernement socialiste de Guy Mollet qui en juin 1956 avait décidé l'instauration de la vignette, présentée alors comme une oeuvre charitable puisqu'il s'agissait d'alimenter un fonds national de solidarité en faveur des personnes âgées.

En réalité, ces dernières (qui, au passage, ont payé toutes ces années la vignette comme les autres si elles possédaient une voiture) n'ont guère profité de ce fonds. Cet impôt a rejoint les autres dans les caisses de l'Etat. Et en 1956, les impôts ont bien plus servi à financer la guerre d'Algérie, alors intensifiée par le gouvernement socialiste, que profité aux vieux.

En 1984, les ressources obtenues par la vignette ont été attribuées, dans le cadre de la " décentralisation " aux départements qui se sont fait alors une concurrence acharnée pour attirer les immatriculations. Ce sont d'ailleurs aujourd'hui ces collectivités représentées par les conseils généraux qui se plaignent le plus de la suppression de la vignette (avec les buralistes qui perdent à cette occasion 5 800 F en moyenne de revenus annuels). L'Etat a promis de compenser intégralement le manque à gagner dans les départements mais les présidents de conseils généraux craignent qu'il ne soit mauvais payeur et se plaignent de l'atteinte à l'autonomie fiscale des départements. Si l'Etat ne compensait plus, ou mal, dans l'avenir, la ressource représentée par la vignette (soit environ 10 % des ressources fiscales actuelles des départements), cela pourrait entraîner une hausse des taxes d'habitation !

Mais si Fabius a décidé la suppression immédiate de la vignette, c'est avant tout pour faire un geste un peu spectaculaire face à la colère que provoque la flambée du prix de l'essence. Mais la mesure ne fera guère illusion.

Pour les possesseurs de grosses cylindrées, le cadeau de la vignette n'est pas négligeable (12 648 F d'économies pour une Mercedes S500 neuve) mais pour la très grand majorité des automobilistes qui ont des voitures de moins de sept chevaux fiscaux, l'économie n'atteint que 400 à 500 F pour l'année pour un véhicule neuf alors que le prix du carburant a pu engendrer une augmentation de plus de mille francs en moyenne. D'après les chiffres du ministère des Finances lui-même, la suppression de la vignette apporte pour un véhicule de 4 CV de moins de 5 ans une économie évaluée entre 134 F et 312 F selon les départements (254 à 616 F pour un véhicule de 7 CV).

Autant dire que l'Etat fait cadeau en gros d'un ou deux pleins d'essence, et c'est tout ! Par ailleurs, le gouvernement se refuse en fait à prendre sur les profits faramineux des compagnies pétrolières ; il s'engage tout juste à amortir, dans l'avenir, les futures hausses par une modulation des taxes sur les carburants (qui représentent tout de même 70 % du prix du litre à la pompe !). Cela devrait éviter les hausses trop brutales à venir mais n'annonce pas une baisse du prix actuel des carburants à la pompe.

La vignette automobile est le symbole même d'un impôt présenté à l'origine comme provisoire, mais qui a duré, et qui a été ouvertement détourné de son objet.

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