Sommer - Allibert (Méru - Oise) : Un patron qui envoie les nervis contre les grévistes26/05/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/05/une-1663.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Sommer - Allibert (Méru - Oise) : Un patron qui envoie les nervis contre les grévistes

Mardi 16 mai, au petit matin, une quarantaine d'hommes de main, payés par la direction de l'entreprise Sommer-Allibert, débarquaient devant l'usine de Méru dans l'Oise et agressaient les grévistes rassemblés devant les portes. Après avoir sérieusement blessé un ouvrier et une ouvrière, ils prenaient le contrôle de l'usine pendant plusieurs heures. C'est un véritable guet-apens que la direction de l'entreprise avait tendu aux travailleurs.

Auparavant, la direction de Sommer-Allibert avait réussi à obtenir la signature de deux syndicats très minoritaires pour faire passer au niveau du groupe (2 600 salariés dans toute la France) un accord dans le cadre de la loi Aubry qui avait provoqué l'hostilité de la majorité du personnel ouvrier, en particulier à l'usine de Méru (1 100 salariés), mais aussi dans le Pas-de-Calais. La direction voulait rendre obligatoire le travail du samedi, sans que celui-ci soit rémunéré, et voulait reprendre une partie des congés spécifiques dont bénéficiaient les salariés, et cela au nom d'un calcul patronal fondé sur le temps " effectif " de travail.

Le syndicat CGT de Méru avait, en fin de semaine, appelé à une assemblée du personnel pour le lundi 15 mai au matin pour s'opposer à ces projets. La direction pendant le week-end précédent fit déménager tous les stocks de cette usine qui est le premier fabricant en France de tableaux de bord et de boucliers plastiques pour l'industrie automobile. Et avant même le démarrage de l'action elle loua les services de nervis prêts à aller agresser travailleurs et syndicalistes. Car ce n'est que quelques heures après le démarrage de la grève lundi matin, que ce commando de plusieurs dizaines d'individus venus de la région parisienne allait débarquer à l'usine, peu de temps après une première provocation des cadres.

Les travailleurs et les militants syndicaux furent surpris par cette agression. Jusqu'ici ce n'était pas les moeurs ouvertes de la direction de ce groupe richissime détenu par la famille Deconinck. Et le malaise fut renforcé par la décision de maintenir la présence des nervis jusqu'à la fin de la grève, ceux-ci occupant ostensiblement les entrées, et encadrant les délégués qui voulaient se déplacer dans l'usine.

La direction, dans la journée, alors que la grève continuait, décida de geler l'essentiel de ses projets pour l'an 2000, plus de samedi obligatoire et flexibilité pour cette année, et prise en charge d'une partie des heures de grève. Du coup l'équipe de nuit décida la reprise mardi soir.

Si les 350 grévistes, représentant la majorité du personnel ouvrier (il y a, en plus, près de 200 intérimaires dans l'usine), se sont sentis renforcés d'avoir pu imposer à la direction de revenir au statu quo, les méthodes de gangster de cette dernière font se poser des questions. Nombre de travailleurs et de militants syndicaux ont la volonté de faire payer à leur patron son attitude : agresser physiquement les travailleurs qui revendiquent leurs droits ! C'est donc cela la " refondation sociale " si chère au patronat ?

Quelques jours après l'agression contre les travailleurs de Sommer- Allibert, se tenait la session du Conseil régional de Picardie à Amiens. Roland Szpirko, élu Lutte Ouvrière de l'Oise, après une rencontre avec les militants CGT de l'usine, et après que ceux-ci lui eurent demandé de faire connaître largement les faits, est intervenu.

" Devant l'émoi dans la population et parmi l'ensemble du monde du travail ", il a relevé que " le Conseil régional, dans le passé, s'est montré libéral vis-à-vis des dirigeants de la société Sommer-Allibert. Ces dernières années 2,750 millions de francs ont été attribués à l'entreprise. La dernière en date de ces aides, ces dernières années, se rapportait " aux ressources humaines ". Même s'il n'y a pas de relation directe, on peut voir ce qui peut entrer dans le champ des ressources humaines pour cette entreprise qui a dû débourser entre 100 000 et 200 000 francs pour cette opération. [...] Le sort de salariés, dont certains ont été blessés sérieusement, mérite de ne pas rester dans l'ombre. Eux ne sont pas des notables ou des dirigeants, et pour une fois le sort réservé à ceux d'en bas, ceux qui créent toutes les richesses, mériterait de faire la Une de l'actualité ".

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