Le Parlement européen parle de tout, mais ne traite sérieusement que les intérêts des capitalistes26/05/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/05/une-1663.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

Le Parlement européen parle de tout, mais ne traite sérieusement que les intérêts des capitalistes

La session plénière du Parlement européen, tenue du 15 au 19 mai dernier, était une session de routine. La presse en a surtout retenu le choix du Parlement européen d'attendre la décision du Conseil d'Etat français à propos de la destitution de Le Pen. Celui- ci a donc obtenu un sursis de la majorité du Parlement et peut continuer à siéger.

En fait, les seuls véritables débats au Parlement ont lieu à propos des sujets où les intérêts économiques des grandes entreprises capitalistes sont en jeu, notamment dans le domaine de la concurrence.

On en a eu encore l'illustration avec un rapport sur un projet de directive de la Commission, à propos des relations financières entre les Etats membres et les entreprises publiques.

Sous prétexte de favoriser la transparence, ce rapport portait uniquement sur la question de savoir si l'aide des Etats ne risque pas de fausser la concurrence entre entreprises publiques et entreprises privées. Nos camarades Arlette Laguiller, Armonie Bordes et Chantal Cauquil, nos élues européennes qui ont voté contre ce projet de directive, ont souligné le fait " qu'une entreprise prenne la décision de jeter à la porte une partie de ses effectifs, augmentant ainsi le chômage, alors qu'une petite partie de ses profits pourrait maintenir les emplois supprimés, n'intéresse nullement la Commission européenne. Pas plus que ne l'intéressent les dégâts causés par la course au profit maximum à l'environnement, à la sécurité et aux conditions de travail de ses salariés. " De toute façon, " la Commission n'est nullement gênée par l'opacité totale qui entoure les choix fondamentaux de toutes les entreprises, la façon dont elles réalisent leurs profits et la façon dont elles les utilisent, fut-ce au détriment de la société ", tandis qu'à notre sens, " l'intérêt de la société exige la transparence totale du fonctionnement et des comptes de toutes les entreprises, publiques ou privées et l'abolition du secret des affaires. Le premier pas dans ce domaine devrait être de supprimer toutes les lois qui menacent de sanction les salariés d'une entreprise qui portent à la connaissance du public et des usagers tout ce qu'ils savent du fonctionnement de leur entreprise. "

Le Parlement a aussi commenté l'orientation économique de la Commission de Bruxelles. Ce commentaire se réduisait à des auto-félicitations sur une série d'orientations économiques, où il n'était pas question des intérêts des travailleurs et des chômeurs, en se réjouissant de la croissance économique qui serait revenue, tout en mettant en garde contre des risques de manifestations intempestives des salariés si ceux-ci n'en tirent aucun fruit.

Ce rapport n'était pas avare d'auto-approbations et d'auto-félicitations. Il n'y avait pourtant pas de quoi, comme nos élues l'ont souligné dans une intervention : " Du point de vue de la population laborieuse des pays de l'Union européenne, il n'y a vraiment pas de quoi se féliciter. A quoi bon la croissance économique dont se vante le rapport si c'est pour [...] prétendre qu'il faut "réviser radicalement les régimes de pension" avec pour objectif de "sauvegarder leur santé financière" ? C'est une façon d'avouer que, dans cette "croissance", il n'y a de place ni pour les salariés ni pour les retraités. Une fois de plus, le Conseil et la Commission se comportent en porte-voix du grand patronat et demandent au Parlement d'apporter sa caution ". En tout cas, ils n'auront pas eu la voix de nos députées.

Celles-ci ont également dénoncé l'hypocrisie d'une résolution commune sur le Zimbabwe qui dénonçait " les occupations illégales " de terres dans ce pays. Cette résolution, prompte à dénoncer les violences qui ont émaillé ces occupations de terres ces dernières semaines, était frappée d'amnésie sur le passé colonial du Zimbabwe et la responsabilité aussi bien des grandes puissances impérialistes que des colons blancs les plus privilégiés.

A tout point de vue, il était plus réconfortant pour nos camarades de participer, mercredi 17 mai à Strasbourg, au soutien d'une manifestation de retraités, lancée notamment à l'appel des syndicats et d'organisations de retraités et cela, en dépit d'une pluie battante.

La semaine précédant la session, le ministre français chargé des Affaires européennes, Moscovici, a fait la tournée des différents groupes parlementaires européens, et bien sûr de celui de la Gauche unitaire européenne (GUE / NGL) auquel les députés LO-LCR sont rattachés. Dans la perspective d'une future présidence française de l'Union européenne (tous les six mois, les Etats membres se succèdent à cette présidence), il venait y vanter les mérites de la politique du gouvernement français de la gauche plurielle pour l'emploi et contre l'exclusion et prétendre que cette politique allait être étendue à l'Europe par la future présidence française.

Une de nos députées présentes, Armonie Bordes, l'a apostrophé. Elle a d'abord dit son scepticisme sur ce que fera la présidence française : " Je ne vois pas ce que vous ferez en Europe alors qu'en France vous n'avez rien fait de sérieux sur l'emploi " et elle a conclu : " Vous n'avez rien changé, parce que pour prendre des mesures sérieuses contre le chômage il faudrait d'abord avoir le courage politique de s'attaquer à la politique des grands trusts et les obliger à prendre sur leurs profits pour maintenir tous les emplois et en créer de nouveaux. "

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