Alstom (Saint-Ouen - 93) : Amiante, un directeur condamné26/05/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/05/une-1663.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Alstom (Saint-Ouen - 93) : Amiante, un directeur condamné

En parallèle aux luttes des travailleurs contre le plan de licenciements, le procès sur l'utilisation de l'amiante contre l'ancien directeur de l'usine Alstom de Saint-Ouen s'est déroulé.

L'affaire remonte à quatre ans, à la mort d'un de nos anciens collègues, Paulin Gestel, des suites d'un cancer lié à l'amiante, amiante désormais interdit mais que nous avons manipulé durant des années et des années à l'usine sans être avisés du danger et sans aucune mesure sérieuse de protection.

A la suite de l'action des salariés de l'entreprise, des plaintes des syndicats CGT et CFDT, et même des poursuites du ministère public, le tribunal a fini par rendre son jugement. L'ancien directeur vient d'être condamné par le tribunal correctionnel de Bobigny.

La responsabilité pleine et entière de l'ancien directeur de l'usine est reconnue, alors qu'il était mis en cause pour " mise en danger d'autrui par violation manifeste et délibérée d'une obligation particulière de sécurité imposée par la loi ". Ces manquements élémentaires à la sécurité ont eu pour résultat la mort de notre collègue, en plus des menaces qui pèsent sur nous tous ou sur les retraités, tous ceux qui ont été exposés aux poussières d'amiante dans l'usine au fil des années.

Le tribunal l'a condamné à une amende de 50 000 F, avec sursis, plus 25 000 F de dommages et intérêts pour chacun des syndicats qui s'étaient portés partie civile. On peut estimer que ce n'est pas cher payé pour la vie d'un ouvrier, mais il est néanmoins important que la justice l'ait condamné. Il semble en effet que ce soit la première fois qu'un chef d'établissement d'entreprise du privé qui utilise de l'amiante (en dehors de celles qui participent directement à sa transformation) soit condamné pour mise en danger d'autrui dans une affaire en rapport avec ce poison.

Ce n'est pas qu'une question de principe. Cela permettra à la veuve de notre camarade ou aux autres travailleurs empoisonnés, ici ou ailleurs, de faire reconnaître leurs droits. Ce jugement, ainsi que d'autres rendus récemment, pourra être un appui au millier de victimes qui ont porté plainte, comme à ceux qui pourraient le faire à leur tour.

A l'usine, les réactions variaient de la satisfaction de voir un des représentants de notre patron Alstom condamné, à des attitudes plus compréhensives dans les bureaux : " Il y en a d'autres au-dessus de lui ", entendait-on. C'est vrai que les vrais patrons, les gros actionnaires de ces grandes entreprises, font faire leur politique à distance et évitent soigneusement de se salir les mains. Mais ce directeur a tout de même accepté personnellement d'appliquer cette politique, mettant même des bâtons dans les roues de ceux qui essayaient de s'y opposer. Il a donc bien été condamné pour ce qu'il a fait, et ce qu'il a refusé de faire.

Et s'il est vrai qu'il y en d'autres au-dessus, cela veut dire que l'action ne doit pas s'arrêter là...

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