Jospin et Fabius au service des possédants28/04/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/04/une-1659.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Editorial

Jospin et Fabius au service des possédants

Jospin et son nouveau ministre des Finances Fabius sont en train d'annoncer leur politique économique pour les deux ans à venir. Mais comme il était à prévoir, le remaniement ministériel n'a rien changé dans les priorités de ce gouvernement.

La mesure la plus précise à attendre de Fabius concerne les stock-options, ces actions distribuées à des conditions privilégiées aux dirigeants d'entreprises et qui leur permettent de réaliser des bénéfices considérables sans même avoir déboursé un centime. Ces revenus-là, gagnés vraiment " en dormant " ne sont taxés qu'à 40 %, pas même le taux des tranches supérieures de l'impôt sur le revenu, qui est de 54 %.

Les détenteurs de stock-options, voilà une vraie priorité pour Fabius, dont il devait s'occuper sans attendre. Pensez donc, un député socialiste avait proposé d'en monter à 50 % le taux d'imposition pour les plus-values dépassant les 500 000 F. Fabius s'est donc emparé du dossier... Et de proposer de retenir ce seuil de 500 000 F, non pour augmenter le taux d'imposition au-delà mais pour le diminuer en-deçà ! Ainsi le " pauvre " détenteur de stock-options qui ne réaliserait une plus-value " que " de 490 000 F serait enfin dédommagé... en n'étant plus imposé pour cela qu'à 26 % au lieu de 40 %.

Le prétexte, c'est que les dirigeants des " start-up ", ces nouvelles sociétés liées à Internet, risqueraient de fuir à l'étranger. Alors, le gouvernement s'occupe d'eux. Quant aux SDF, aux RMistes, aux chômeurs, aux smicards, ils peuvent attendre : eux, ils ne risquent pas de s'enfuir à Londres ou dans un paradis fiscal.

A part cela, le gouvernement annonce un projet de loi sur les " nouvelles régulations économiques ". Il en avait déjà été question en septembre lorsque Michelin avait fait scandale en annonçant des milliers de licenciements, et que Jospin avait déclaré en substance qu'il n'y pouvait rien. Mais la régulation dont il s'agit n'a vraiment pas de quoi faire trembler les patrons licencieurs à la Michelin, Alstom et autres, qui continuent d'annoncer presque quotidiennement leurs plans de suppressions d'emplois en même temps que des bénéfices en hausse. La législation sur les " offres publiques d'achat " serait modifiée, l'effectif maximum des conseils d'administration des entreprises serait augmenté, les pratiques commerciales seraient " moralisées ". Mais qu'est-ce que cela pourra bien changer à la toute-puissance des patrons qui continuent de jeter des milliers de personnes sur le pavé en fonction des profits qu'ils en escomptent à la Bourse ?

Pour le reste, on apprend que les dépenses pour les services publics seraient toujours soumises à l'austérité. Après les tout petits coups de pouce annoncés ces derniers mois sous la pression des luttes des travailleurs des hôpitaux ou des enseignants, Jospin n'aurait plus rien à ajouter de ce côté- là. Le nouveau ministre de la Fonction publique, de son côté, a déjà annoncé dans ses négociations avec les syndicats que ce sera toujours " zéro embauche " alors que le manque de personnel se fait sentir partout d'une façon dramatique.

Voilà ce qu'a à nous annoncer ce gouvernement, qui se dit de gauche on ne sait plus très bien pourquoi. Il se vante d'une réussite économique qui n'en est une que pour les capitalistes, les spéculateurs ou les détenteurs de " stock-options ", tandis que le chômage ne recule un peu qu'au profit de la précarité, et que la misère continue de s'accroître dans les banlieues et les quartiers populaires.

Alors oui, il faut imposer que les richesses servent à améliorer le sort de l'ensemble de la population et pas les profits d'une poignée de capitalistes.

Les luttes des travailleurs des impôts, des enseignants, des hospitaliers et de bien d'autres ces mois derniers ont montré qu'on pouvait forcer le gouvernement à infléchir sa politique. Mais pour imposer vraiment d'autres priorités, il faudra que ces luttes s'amplifient, s'unifient, convergent pour devenir une seule lutte, une lutte de l'ensemble des travailleurs. Ceux-ci, qui produisent toutes les richesses de cette société, ont non seulement le droit d'imposer cela, ils en ont la force.

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