Répression en Tunisie : Treize ans de régime Ben Ali... et d'arbitraire policier21/04/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/04/une-1658.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans le monde

Répression en Tunisie : Treize ans de régime Ben Ali... et d'arbitraire policier

En Tunisie, le journaliste Taouflik Ben Brik poursuit sa grève de la faim depuis le 3 avril. Il entend ainsi s'exprimer " au nom de tous ceux qui sont privés de passeport, de téléphone, de courrier en Tunisie ". Il a déjà comparu trois fois devant un juge d'instruction qui lui demandait des comptes sur les articles qu'il a publiés sur l'absence de libertés démocratiques en Tunisie.

Il entend ainsi dénoncer " le naufrage du journalisme " en Tunisie et s'exprimer sur tous les sujets interdits dans ce pays, notamment " la police, la corruption, la torture, l'état des libertés, les émeutes, les grèves, les manifestations ".

D'autres personnalités ont été arrêtées le 8 avril dernier, notamment Fathi Chamkhi, responsable de Raid (Attac en Tunisie) et Mohamed Chourabi, autre membre de cette association, au moment où ils faisaient des photocopies dans une boutique. Le commerçant a également été interpellé. Tous trois ont été inculpés et écroués à la prison de Mornag. Ils sont accusés de " diffusion de fausses nouvelles de nature à troubler l'ordre public, appel aux citoyens à violer les lois du pays, appartenance à une association non reconnue " et devraient comparaître devant un juge jeudi 20 avril.

Si Attac n'est pas reconnue en Tunisie, c'est que le ministre de l'Intérieur tunisien a placé ses responsables dans l'illégalité en bloquant la délivrance d'un récépissé de dépôt des statuts de l'association.

Les actes arbitraires du régime de Ben Ali, à la tête de l'Etat depuis 1987, sont multiples et concernent tous les aspects de la vie de la société tunisienne : fichages, surveillance des lieux publics, rafles, intimidations, abus de pouvoir, punitions collectives, kidnapping, filatures, vols, saccages des biens, aggressions physiques, interdiction de travailler, surveillance administrative, torture dans les prisons, etc. Les moyens de communication, presse, cabines publiques de téléphone, la Poste, les paraboles, internet font l'objet d'une législation répressive et d'une surveillance constante.

La répression touche aussi bien les groupements auto-constitués n'ayant pas respecté les procédures légales de déclaration d'une association (ou placés dans cette situation par les autorités comme dans le cas d'Attac) mais également des groupements ou partis ayant suivi toutes les procédures de reconnaissance légale. L'interpellation et la mise en détention des responsables d'un groupement lors de la proclamation d'une association ou d'un parti constitue même une procédure dont l'Etat tunisien est friand. Il s'est ainsi attaqué au Parti Communiste Ouvrier Tunisien, à l'Organisation des Communistes Révolutionnaires (en 1985 et 1991), au Comité de défense des prisonniers d'opinion (1993), au moment de la dissolution de la Ligue des Droits de l'Homme ainsi qu'à Ennahdha (ex-Mouvement de la tendance islamique) en 1989 et au Rassemblement unioniste démocratique. La répression a aussi touché le mouvement syndical. Certains militants de ces mouvements, mais aussi des sympatisants, et même des innocents raflés en même temps qu'eux, croupissent en prison depuis des années.

Quelques chiffres permettent de mesurer l'ampleur de la répression : la Tunisie ne compte que 9 millions d'habitants mais elle dispose de 130 000 policiers, autant que la France. Enfin, le budget officiel du ministère de l'Intérieur qui coordonne toute cette répression a quintuplé entre 1987 et 1999.

Et si l'on n'entend guère les Chirac et les Jospin protester contre la dictature de leur ami Ben Ali, c'est qu'en bons représentants de l'impérialisme français, ils ne sont pas trop regardants sur un régime qui à sa façon, la manière forte, entend bien défendre, en même temps que son régime, les intérêts des trusts de l'ex-puissance tutélaire.

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