Microsoft condamné : Coup de torchon sur la " nouvelle économie" virtuelle07/04/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/04/une-1656.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans le monde

Microsoft condamné : Coup de torchon sur la " nouvelle économie" virtuelle

Le juge américain Thomas Jackson a reconnu le propriétaire de Microsoft, Bill Gates, coupable d'avoir violé la loi antitrust américaine, en usant de pratiques anticompétitives. Le milliardaire de l'informatique a évidemment décidé de faire appel, ce qui devrait lui faire gagner deux ans de procédure et retarder les éventuelles sanctions après ce jugement. Cependant, la Bourse n'a pas attendu deux ans pour que le titre Microsoft, pourtant une des valeurs vedettes de ce qu'il est désormais convenu d'appeler " la nouvelle économie ", voit sa cote dégringoler... mais ce n'est peut-être que partie remise.

Fidèles à eux-mêmes, les boursicoteurs avaient d'ailleurs anticipé la décision du juge : au cours de la journée du lundi 3 avril, le titre Microsoft perdait près de 15 % de sa valeur, soit 80 milliards de dollars (environ 544 milliards de francs), ce qui pour un titre placé en tête de la capitalisation boursière (soit 553 milliards de dollars) constituait un coup dur. Bill Gates, propriétaire à titre personnel de 15 % des actions Microsoft, perdait du même coup environ 71 milliards de francs.

Les pertes de Microsoft n'ont pas tardé à faire boule de neige sur le marché boursier, entraînant une baisse de 7,62 % du Nasdaq, l'indice boursier censé mesurer le marché des valeurs technologiques et donc les progrès de la prétendue " nouvelle économie " qui est devenue la vitrine de tous les laudateurs du libéralisme économique. La baisse a fait ensuite le tour d'autres places boursières : perte de 2,48 % à Paris et de 2,24 % à Francfort. Ces baisses découlaient de la chute de différents titres liés également à la " nouvelle économie " : perte de 13,4 % pour Thomson Multimedia, de 16,7 % pour Dassault Systèmes et de 6 % pour France Télécom.

On nous rebat les oreilles ces derniers temps avec la " nouvelle économie " censée tirer le char de l'économie mondiale et le faire s'envoler vers de nouvelles cimes. Mais cet épisode montre que la " nouvelle économie " reposant pour l'essentiel sur une fiction spéculative est du coup à la merci du marché boursier, plus encore peut-être que l'ancienne économie.

Bien entendu, comme à chaque chute de la Bourse, on nous explique qu'après tout cette disparition de quelque 500 milliards de francs sur un titre n'est pas grave puisqu'il s'agirait en quelque sorte d'un repli par rapport à une valeur artificielle des actions. L'argument serait plus convaincant si, par ailleurs on ne nous présentait pas le gonflement spécutalif des actions comme l'indice de la bonne santé économique et de son avenir triomphant.

A peine Microsoft vient-il de régresser que les commentateurs, en quête de nouvelles perspectives rassurantes, vantent les mérites du nouveau premier de la classe : Cisco, fournisseur de matériel pour Internet. Cette société a vu la valeur de son action progresser, en dix ans, de 119 000 %. Une progression qui peut exciter certains spéculateurs, mais qui trahit pour qui veut bien garder les pieds sur terre le caractère artificiel et dément de la spéculation boursière. Car une réaction en chaîne du type de celle à laquelle on vient d'assister avec la baisse du titre Microsoft, pourrait fort bien s'amplifier, devenir incontrôlable et déboucher, à l'inverse des contes roses qu'on nous assène sur la " nouvelle économie ", sur un recul de toute l'économie. L'affaire Microsoft peut en être un nouvel avertissement, pas forcément sans frais.

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