Oui, il faudrait faire reculer le patronat04/02/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/02/une-1647.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

Oui, il faudrait faire reculer le patronat

La journée de manifestations du personnel des hôpitaux du 28 janvier a marqué le coup d'envoi d'une semaine qui s'annonçait riche en mouvements sociaux, en particulier dans les transports, la Sécurité sociale, et bien des entreprises où la loi Aubry est perçue - à juste titre par les travailleurs comme moyen donné au patronat d'introduire plus de « flexibilité », C'est-à-dire d'imposer les horaires les plus aberrants s'il y trouve son compte.

Et la situation critique des hôpitaux est tout un symbole des conséquences de la politique des gouvernements qui se sont succédé depuis vingt ans, quelle qu'ait été leur couleur politique.

Sous prétexte d'aider les entreprises à créer des emplois, on a multiplié les cadeaux aux patrons, en diminuant les impôts sur les bénéfices ou les charges sociales. Les patrons ont empoché, et n'ont pas créé d'emplois. Mais il fallait bien financer cette politique et l'Etat a entrepris dé faire « des économies » dans les services publics. Il a diminué les effectifs dans les hôpitaux, la SNCF, les transports en commun. Ce faisant, il a encore augmenté le chômage, en supprimant des milliers d'emplois. Et nous en sommes arrivés à une situation où dans l'un des pays les plus riches de la planète, les hôpitaux commencent à ressembler à ceux des pays sous développés. où les assurés sociaux attendent pendant des semaines le remboursement de leurs dépenses de santé, parce qu'il n'y a pas assez de personnel pour traiter les dossiers. Où pour faire face à la pollution, on explique doctement à la population (y compris aux travailleurs épuisés par leur journée de travail, et aux personnes âgées) les bienfaits de la bicyclette et des rollers, sans développer des transports en commun suffisants. Où dans la plupart des établissements scolaires, le manque d'enseignants se fait cruellement sentir.

Cela n'empêche évidemment pas les gens qui nous gouvernent de tenir des discours optimistes. L'économie irait mieux. Le chômage serait en recul. L'avenir s'annoncerait radieux. Mais si l'économie va bien pour les industriels et les banquiers qui ont vu leur fortune augmenter de 50 % dans la seule année 1999, le niveau de vie des classes laborieuses est, lui, en recul. Si le chômage a un petit peu diminué (ce qui reste à démontrer, tant les statistiques officielles sont manipulées), il reste à un niveau qui aurait été considéré, il y a vingt ans, comme catastrophique. D'autant que le nombre d'emplois précaires a considérablement augmenté et, de Moulinex à Alstom ou Aventis, les plans de suppressions d'emplois continuent à se multiplier.

Alors, il est bon que le mécontentement des travailleurs se fasse entendre, de toutes les façons possibles, dans les jours qui viennent. Car la « bonne santé » de l'économie, dont se gargarise le gouvernement, prouve justement que ce n'est pas d'une amélioration de la situation économique que les travailleurs peuvent attendre une amélioration de leur sort. Que les «indicateurs économiques» soient au rouge ou au vert, ce sont toujours les mêmes qui encaissent les bénéfices, toujours les mêmes aussi à qui on dit que ce n'est pas le moment de revendiquer.

La seule manière de ne plus être les éternels perdants de ce jeu truqué, c'est de renverser le rapport de force entre le patronat et la classe ouvrière, c'est d'imposer au gouvernement un changement de politique. Nous le pouvons, car c'est nous qui produisons toutes les richesses, qui faisons tout fonctionner. Et on a bien vu, après les tempêtes de décembre, que pour faire marcher la société, les travailleurs étaient infiniment plus utiles que les actionnaires !

Les mouvements revendicatifs qui sont programmés par les organisations syndicales dans les jours qui viennent ne suffiront certes pas à faire reculer le gouvernement et le patronat. Mais s'ils permettent à la classe ouvrière de reprendre confiance en elle-même, de prendre conscience de sa force collective, ils peuvent constituer une étape utile dans la préparation de cette contre-offensive d'ensemble qu'il lui faudra bien livrer un jour.

Editorial des bulletins d'entreprises du 31 janvier.

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