Marée noire : "plus jamais ça !"... jusqu'à la prochaine... !14/01/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/01/une-1644.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

Marée noire : "plus jamais ça !"... jusqu'à la prochaine... !

Tandis que le pétrole de l'Erika continue à se déverser sur les plages, on assiste aux habituelles déclarations des pétroliers et des pouvoirs publics affirmant qu'ils vont tout faire à l'avenir pour rendre une telle catastrophe impossible. Même le PDG de TotalFina s'affirme sans rire favorable à un " durcissement " des règles régissant le transport du pétrole ! Au fil des révélations sur le navire naufragé, on avait pourtant l'impression que sa spécialité était plutôt de tourner les règles quelles qu'elles soient...

Il affirme même avoir écrit dans ce sens à ses homologues des autres compagnies pétrolières. Les patrons de Shell ou de BP ont dû bien s'amuser à le voir tenter de se dépêtrer ainsi du pétrin où son fuel l'avait mis. Côté gouvernement, Jean-Claude Gayssot a dit qu'il allait organiser une table ronde en février pour " élaborer une véritable charte de la sécurité maritime ". Une table ronde de plus, ça ne résout rien... mais ça permet de voir venir.

Toutes ces paroles-là, on les a déjà entendues, à peu de choses près, lors des précédentes marées noires. La liste est longue, du Torrey Canyon à l'Olympic-Bravery, à l'Amoco- Cadiz ou au Tanio. Des promesses sans lendemain, qui n'ont rien changé. Passée l'indignation du moment, les compagnies ont continué à faire transporter leur pétrole au moindre prix, et aujourd'hui les habitants des côtes polluées n'ont plus qu'à ressortir leurs pelles, leurs seaux, et leurs pancartes " plus jamais ça ! ".

Pourtant, les mesures à prendre n'ont rien de bien mystérieux. Le naufrage de l'Erika les a une nouvelle fois fait apparaître au grand jour. 80 % des naufrages concernent des navires de plus de 15 ans d'âge. Il faut croire que c'est là le délai de sécurité au-delà duquel commence l'ère des rafistolages hasardeux, comme ceux qu'avait subis l'Erika. Les normes de sécurité de l'Organisation Maritime Internationale sont manifestement insuffisantes, elles ne rendent par exemple pas obligatoire la double coque. Mais surtout, il est de notoriété publique qu'elles ne sont même pas respectées. 40 % des navires sont ainsi totalement hors normes, et n'ont été inspectés que sur le papier, les autorités se satisfaisant de certificats bidons.

Qu'est-ce qui empêcherait d'interdire l'accès des ports à ces vaisseaux de la mort, dont la liste existe certainement dans quelques ordinateurs, de les arraisonner pour les obliger soit à se mettre aux normes, soit à partir à la casse ? Pourquoi serait-il impossible de taxer lourdement les compagnies pétrolières qui s'obstineraient à utiliser de tels navires ? Après tout, l'Etat impose bien un contrôle technique régulier à des millions d'automobilistes et mobilise une armée de contractuels pour vérifier qu'il est fait !

Il est vrai que dans ce cas c'est la population qu'il s'agit de contrôler, de taxer au besoin, et que ce contrôle profite aux trusts de l'automobile. Dans le cas du pétrole et des marées noires, il s'agirait de prendre des mesures contraignantes vis-à-vis de trusts, dans l'intérêt évident de la population. C'est bien pourquoi, gouvernement après gouvernement, rien n'est fait.

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