Les voeux de Chirac-Jospin : Après la tempête, du vent, toujours du vent07/01/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/01/une-1643.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

Les voeux de Chirac-Jospin : Après la tempête, du vent, toujours du vent

Les voeux de Chirac à la population, tout comme ceux de Jospin à Chirac, ont, cette année encore, relevé du même rituel qui fait qu'on " se la souhaite bonne et heureuse ". A ce titre, ils ne valent pas plus. Sauf qu'en cette période de cohabitation préélectorale, les amabilités réciproques ont été parsemées d'épines et de piques, dérisoires, et sans doute sans effet sur l'opinion des futurs citoyens-électeurs. Le jeu politicien le veut ainsi.

Nos deux cohabitants y sont donc allés de leur couplet sur " la France qui ", " la France que "... Mais cette fois les circonstances leur ont imposé, ou permis, de parler de la solidarité qui a uni les Français devant les épreuves de fin d'année, une solidarité qui, si elle n'a pas fait défaut dans la population, ne s'est pas sentie du côté des pouvoirs publics et des nantis.

Chirac, un jour champion du libéralisme aux côtés de ses amis de la droite, s'est transformé, l'espace d'un discours, en apologiste de l'Etat. " Nous mesurons, a-t-il déclaré, l'importance du rôle de l'Etat dans notre société. Un Etat auquel il appartient de prévoir de faire face, d'assurer la coordination des moyens du pays ". En écho, Jospin a rendu hommage à " tous les fonctionnaires et agents des services publics qui ont travaillé sans relâche pour porter secours, pour restaurer le bon fonctionnement des infrastructures collectives pour que la vie reprenne ses droits ". Heureusement que ces agents au service de la collectivité n'ont pas attendu les félicitations rétrospectives de ces deux rois mages pour être présents et se mettre à l'ouvrage. Mais ces vains discours ont au moins permis de prendre la mesure de l'hypocrisie commune de leurs auteurs. Ce sont ces même bons apôtres qui, successivement, mais de connivence, ont allègrement tranché dans ce service public dont ils vantent la nécessité.

La SNCF par exemple a perdu 80 000 emplois en douze ans.Mais quand il s'agit de remplacer les rails, le ballast emporté ou les signalisations arrachées, ces saignées dans les effectifs, qui en temps ordinaire se font déjà sentir pour gérer le quotidien, apparaissent avec acuité.L'équipement est justement l'un des secteurs où le mécontentement à propos de l'insuffisance des effectifs s'est exprimé le plus fort à l'occasion de la mise en place des " 35 heures ". Il en est de même à EDF, qui a dû rappeler des pré-retraités, parce que leur poste n'avait pas été remplacé.

Partout on peut faire le même constat. Les pompiers, dont les revendications se sont heurtées à l'intransigeance gouvernementale, ont payé un lourd tribut à la catastrophe, qui a montré tragiquement ce qui crevait les yeux, sauf ceux des ministres : que leur fonction était effectivement " à risque ".

Il en va de même ailleurs, dans les hôpitaux par exemple, pour lesquels on mégote des rallonges budgétaires qui permettraient d'alléger la tâche du personnel et du même coup d'augmeter la qualité des soins ; dans l'enseignement on manque de personnel, l'insuffisance des locaux et du matériel est là encore criante, alors qu'on veut le réduire.

Comment en est-on arrivé là ? Jospin a trouvé le coupable : " le capitalisme sauvage ", affirmant que, " face à l'appétit souvent excessif (Ah, si seulement ils avaient un appétit normal !) des appétits marchands, les droits de la personne humaine, la qualité de notre environnement doivent être défendus ". Constatons que ce flot de voeux pieux reste fortement mazouté par la réalité. Car n'est-ce pas ce même Jospin qui a privatisé, depuis qu'il est à la tête du gouvernement, plus à lui seul que les gouvernements Balladur et Juppé réunis ? N'est-ce pas lui qui met en place les mesures de Juppé instituant la dégradation du service public de la santé ?

Chirac lui a expliqué que la " responsabilité de tous ceux quidans le monde dégradent le patrimoine naturel doit être recherchée et sanctionnée ". Pas besoin d'aller rechercher bien loin. Les responsables actuels, passés et malheureusement à venir, sont bien connus. Ils ne se cachent même pas. Leurs noms et leurs raisons sociales figurent presque chaque jour dans les pages financières des journaux.

Quant aux menaces de sanctions, elles n'ont pas l'air d'inquiéter le monde des affaires et des marchands, ni de leur couper l'appétit, si l'on en juge par les baromètres des Bourses qui restent obstinément au beau fixe.Cela se comprend sans peine, si elles n'ont à craindre que les foudres verbales et sans lendemain des Jospin, Chirac et autres.

Il en sera tout autrement lorsque la population s'en occupera elle-même et prendra au mot les discours des gouvernants.

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