Cohn-Bendit et Voynet les pieds dans le mazout07/01/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/01/une-1643.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

Cohn-Bendit et Voynet les pieds dans le mazout

On aurait pu s'attendre que le naufrage de l'Erika se traduise, en termes politiciens, par un succès pour les écologistes. Enfin, à l'occasion d'une marée noire, ils auraient pu donner leur mesure et leur détermination à proposer des moyens de combattre ce type de fléau. Eh bien, on a surtout vu qu'ils ne proposaient rien de particulièrement efficace, et que, par-dessus le marché, ils avaient l'art de s'empêtrer dans leurs déclarations avec autant de grâce que des oiseaux dans le fioul.

Dominique Voynet a commencé par déclarer, le 25 décembre à La Baule, qu'elle n'était " pas complètement certaine qu'il s'agisse d'une catastrophe écologique ", propos pour le moins maladroits qu'elle a tenté de rattraper en comparant avec le Vénézuela " où il y a vingt-cinq mille morts à la suite des inondations, c'est une vraie catastrophe et on s'y intéresse peu ". C'est exact, bien sûr, mais cela ne pouvait que hérisser les riverains du littoral atlantique qui commençaient à racler le mazout. Personne ne songeait à comparer avec le Venezuela, mais pourquoi vouloir minorer les conséquences du naufrage de l'Erika ?

Puis, lorsqu'elle a voulu se défendre d'avoir passé quelques jours de vacances à l'Ile de la Réunion, elle a remué encore une bonne fois le goudron en déclarant : " Les pêcheurs blancs de l'île-d'Yeu méritent-ils plus d'attention que les pêcheurs un peu bronzés des Antilles ? " (l'île de la Réunion, soit dit en passant, se trouve dans l'océan Indien...).

Bref, alors que la ministre de l'Environnement n'avait strictement rien fait en faveur de l'environnement (de toute manière, elle ne dispose d'aucun moyen pour cela), son rôle s'est donc limité à quelques gaffes, qui ont provoqué la consternation chez les Verts parlant des " erreurs de communication du ministère ".

Là-dessus, Cohn-Bendit a tenté de relativiser les paroles de la ministre, en déclarant qu'" elle a couru derrière en se trompant d'explications : ça peut arriver à tout le monde ". Et d'ajouter : " Elle a eu une réaction d'infirmière dans une situation de catastrophe ". Quand on se souvient que Dominique Voynet est médecin, on appréciera la " gentillesse " de Cohn-Bendit.

Une gaffe chassant l'autre, celle de Cohn-Bendit est en train de faire oublier celles de la ministre. Mais au fond, s'agit-il de gaffes, et non pas plutôt du naturel qui ressort ? Cohn-Bendit a manifestement une piètre opinion des infirmières et du " petit personnel " en général. Lui se situerait plutôt à l'étage éthéré des oracles donneurs de conseils.

Pour le moment les Verts sont donc empêtrés à essayer d'effacer les déclarations polluantes de leurs représentants.

Mais si on gratte justement derrière ces mini-scandales verbaux, on se rend compte que le programme des écologistes concernant les transports pétroliers est à peu près inexistant. Certes les Verts proposent de boycotter TotalFina (comme Philippe de Villiers d'ailleurs) et ils réclament une redéfinition des responsabilités entre les compagnies pétrolières et les armateurs. Mais cela ne va pas bien loin. Après tout les dirigeants des grands Etats ne seraient pas hostiles à " moraliser " la profession pour éviter les marées noires. Mais cela dépend, depuis des décennies, du bon vouloir des capitalistes du pétrole auxquels ils ne veulent pas faire de peine.

Comment faire en sorte que des catastrophes du genre de l'Erika deviennent impossibles, voilà ce qui serait intéressant de discuter. Seulement, pour cela, il faudrait s'attaquer avec un peu de fermeté au capitalisme lui-même qui a absolument les mains libres en matière de transports maritimes, comme pour tout le reste.

Pendant la période du naufrage de l'Erika, combien de pétroliers brinquebalants sont-ils passés dans le " rail d'Ouessant " ? Par quels bateaux, en ce moment-même, est transporté le pétrole de TotalFina (et des autres marques bien sûr) ? On peut espérer que le trust choisit en ce moment les pétroliers qu'il loue avec un peu plus de discernement. Mais au fond, nul n'en sait rien, et nul ne veut se donner les moyens de contrôler et de contraindre les dirigeants de TotalFina et leur semblables.

Sur tous ces problèmes, les Verts sont muets, et ce n'est pas la ministre du gouvernement Jospin qui va partir en guerre contre le capital, fut-il pollueur. Alors TotalFina n'a pas grand chose à craindre avec des adversaires de cette taille, et Dominique Voynet et Cohn-Bendit peuvent continuer à bavarder, ça n'a aucune importance...

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