Face au patronat et au gouvernement19/11/19991999Journal/medias/journalnumero/images/1999/11/une-1636.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Tribune de la minorité

Face au patronat et au gouvernement

Plusieurs journées d'action sont prévues dans les semaines qui viennent, notamment celle du 30 novembre, jour de l'examen en seconde lecture du projet de la loi Aubry à l'Assemblée Nationale, appelée par la CGT et le Groupe des Dix, dont SUD, ou encore celle du 11 décembre sur l'emploi et contre les licenciements proposée par le PCF et la plupart des organisations présentes à la manifestation du 16 octobre à Paris, dont Lutte Ouvrière et la Ligue Communiste Révolutionnaire.

Un succès de ces journées ne pourra que renforcer le moral de tous les travailleurs combatifs et renforcer leur détermination à contrer les attaques du patronat et du gouvernement.

Ces dernières semaines, et en ce moment même d'ailleurs, de l'automobile aux transports et en passant par les mineurs et d'autres secteurs ont eu lieu ou ont lieu des mouvements dont la plupart sont suscités par l'application des accords Aubry. Mais s'ils sont dus à la même cause, ils restent dispersés et sans liens entre eux.

Alors il faudra bien que ces journées d'action, comme celle prévues dans les postes, dans les banques ou encore les grands magasins finissent par converger vers un mouvement d'ensemble. Seule une riposte générale et massive pourrait changer le rapport de force avec le patronat, forcer celui-ci à céder et reculer, à rendre des comptes sinon à rendre gorge.

Bien sûr, tel que cela s'annonce pour le moment, on est encore loin de cette convergence. Les syndicats ou les associations s'apprêtent à manifester encore une fois de leur côté (et pas forcément les uns avec les autres) et les partis politiques de l'autre. Chacun en voit bien les raisons : chez tous, y compris syndicats et associations, les calculs politiciens et l'esprit de boutique ; chez les directions des organisations de la " gauche plurielle ", la volonté de faire oublier aux travailleurs que le gouvernement est autant responsable que le patronat dans les attaques actuelles contre les salariés, les chômeurs ou les retraités.

De tels calculs peuvent rebuter un certain nombre de militants et de travailleurs, leur ôter l'envie de préparer et de participer à toutes ces journées d'action, comme cela a été le cas le 16 octobre. Mais " bouder " ces journées d'action ne peut que profiter au patronat, au gouvernement et aux politiciens qui le soutiennent. Tous les militants et les travailleurs qui souhaitent que la classe ouvrière cesse de recevoir des coups et commence à les rendre doivent militer pour que toutes ces mobilisations soient des succès.

Mais ils doivent militer aussi pour qu'elles se donnent des objectifs clairs, fixés en fonction des seuls intérêts de la classe ouvrière, qui répondent aux attaques dont elle est victime en ce moment même, qui désigne donc clairement l'adversaire : le patronat bien évidemment, mais aussi la loi Aubry et le gouvernement qui protège celui-là et a concocté celle-ci.

C'est exactement l'occasion pour l'extrême gauche de proposer le plan d'urgence, pour lequel elle faisait campagne avant les européennes, il y a quelques mois encore. De le proposer au PCF ou aux syndicats comme à tous les militants et les travailleurs qu'ils vont entraîner dans la rue. Et de proposer tout le plan d'urgence, et pas seulement ce qui ne remettrait pas en cause directement la participation ou le soutien au gouvernement. Car ce serait alors faire le jeu de ceux qui espèrent bien que l'ambiguïté entretenue par ou dans ces manifestations leur permettra de continuer à soutenir ou participer à une politique anti-ouvrière tout en prétendant participer ou soutenir aussi le mouvement des travailleurs.

Il ne s'agit ni de faire de ces manifestations un règlement de compte entre l'extrême gauche et le PCF ou la CGT, ce qui risquerait davantage de démobiliser les travailleurs que de les éclairer sur leurs ennemis ouverts ou cachés, ni de poser des conditions pour manifester avec ces organisations quand elles appellent les travailleurs à le faire. Mais à l'inverse, manifester avec elles ne doit pas signifier soutenir sans réserve leurs directions sous le prétexte fallacieux qu'elles feraient un pas sur leur gauche. Le PCF n'en reste pas moins membre du gouvernement, ses députés n'en laissent pas moins passer des mesures scélérates ou n'en votent pas moins la loi Aubry, dont la CGT demande seulement l'amélioration pas l'abrogation.

Quelles que soient leurs critiques, leur méfiance ou même leur hostilité à l'égard de l'extrême gauche, ce qui plaît chez elle à nombre de militants du PCF ou des syndicats, c'est son ton radical, son intransigeance vis-à-vis de la droite comme de la gauche, c'est le fait qu'elle n'ait jamais abandonné le camp des travailleurs pour de minables strapontins ministériels. Si nous voulons les toucher aujourd'hui, il faut certes montrer notre solidarité en descendant dans la rue avec eux, mais aussi conserver le ton et les discours directs qui, dans des circonstances moins favorables, ont pourtant conquis leur estime.

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