Négociations de l'OMC à Seattle : " nos " capitalistes sont les premiers responsables du chômage en France05/11/19991999Journal/medias/journalnumero/images/1999/11/une-1634.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

Négociations de l'OMC à Seattle : " nos " capitalistes sont les premiers responsables du chômage en France

Le 30 novembre prochain va débuter à Seattle un nouveau " round " de négociations de l'OMC (Organisation Mondiale du Commerce) - " le round du millénaire " ! - regroupant 134 pays. L'objectif de ces discussions, qui devraient durer au moins trois ans, est d'arriver à un règlement commun entre les participants concernant des sujets qui fâchent : l'agriculture d'abord, mais aussi, entre autres, les services, la concurrence ou l'environnement. L'OMC a succédé au GATT le 1er janvier 1995. C'est une sorte de tribunal de commerce international où dominent, bien entendu, les intérêts des principales puissances impérialistes de la planète : les Etats-Unis, le Canada, les pays d'Europe et le Japon. Les pays du Sud font traditionnellement les frais des décisions édictées dans les pays riches, qui visent à faire baisser les barrières douanières et à déréglementer le commerce au profit de l'industrie des pays développés.

A cela se superposent les rivalités entre impérialistes. Les grands groupes industriels et agricoles américains souhaitent, pour soutenir leurs ventes en Europe, qu'y soient plus largement ouvertes les frontières et obtenir le démantèlement du système des subventions européennes à son agriculture. Et les champions de la défense des intérêts franco-français se rebellent, du moins verbalement. Un Pasqua, par exemple, dénonce la mainmise américaine sur " nos " produits, " une politique stratégique de domination mondiale menée par les Etats-Unis ", et demande solennellement au chef de l'Etat et au Premier ministre de ne pas participer aux négociations de Seattle. C'est sans surprise le cheval de bataille du MDC, le parti de Chevènement. Mais ils sont rejoints dans la demande de moratoire des négociations à Seattle, aussi à gauche par des députés du PCF, des Verts, ou la Gauche socialiste, qui ont eu l'occasion de s'exprimer le 26 octobre dernier à l'Assemblée sur ce sujet, qui dénoncent les effets de la mondialisation et les conséquences pour la population de la déréglementation programmée par l'OMC. ATTAC (Association pour la Taxation des Transactions financières pour l'Aide aux Citoyens), la Coordination pour un contrôle citoyen de l'OMC, la Confédération paysanne (en lutte notamment contre la taxation des produits français outre-atlantique) appellent à une journée d'action contre l'OMC le 27 novembre dans toute la France. Ils ont été rejoints depuis par des organisations syndicales, des intellectuels, des cinéastes (qui défendent l'exception culturelle française rebaptisée " diversité culturelle " et l'industrie française du cinéma) et plusieurs organisations politiques de gauche et d'extrême gauche dans cet appel. Le 30 novembre même, jour de l'ouverture des négociations de l'OMC, des syndicats américains, dont l'AFL-CIO, des Églises, des mouvements écologistes et des ONG qui craignent les conséquences d'une déréglementation et de la privatisation par exemple des services aujourd'hui publics, appellent à manifester à Seattle même.

Il est légitime de combattre la dégradation des conditions de travail et le chômage aggravés par les décisions que peuvent prendre les défenseurs des grands groupes capitalistes dans des institutions comme l'OMC. Il ne faut pour autant ni diaboliser ce qui n'est qu'un instrument, l'OMC, et faire oublier, en se focalisant contre l'industrie américaine, que les responsables du chômage à Michelin ou à Epéda par exemple, sont aussi ici en France et qu'ils gagnent des fortunes en surexploitant les travailleurs sans avoir besoin d'obéir à des consignes lointaines fixées dans des commissions européennes ou aux Etats-Unis. Ni enfin, au nom de la défense des travailleurs, défendre moindrement, en fait, les prérogatives des groupes capitalistes français.

Les négociateurs représentant les puissances impérialistes à l'OMC sont à la fois rivaux en affaires, et complices contre les pays pauvres et pour aggraver la situation des classes laborieuses partout pour gagner plus de profits.

Il ne s'agit pas d'un " nouveau " capitalisme, d'un " ultra-libéralisme " plus agressif qu'avant ou des effets pervers de l'internationalisation croissante des échanges, mais bien du fonctionnement exacerbé du capitalisme " ordinaire ", toujours plus assoiffé de profits, qui mène une guerre économique sans merci et qu'il faut combattre partout, aux Etats-Unis comme en France.

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