Inde : Victimes du cyclone et de l'impérialisme05/11/19991999Journal/medias/journalnumero/images/1999/11/une-1634.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans le monde

Inde : Victimes du cyclone et de l'impérialisme

Le cyclone qui a ravagé l'Etat d'Orissa, dans l'est de l'Inde, en bordure du Golfe du Bengale, a été l'un des plus violents, si ce n'est le plus violent du siècle. Les survivants font état de vagues gigantesques de quinze mètres de haut, emportant tout sur leur passage et noyant ensuite des provinces entières. Il est impossible de savoir combien il y a eu de victimes. Certainement des millions de sans-abri et des milliers, si ce n'est des dizaines de milliers de morts.

Les cyclones du Golfe du Bengale sont terrifiants et lorsqu'ils frappent les côtes les plus basses, comme ce fut le cas à plusieurs reprises au Bangladesh, les morts se comptent parfois par centaines de milliers.

Plusieurs jours après cette catastrophe les survivants qui errent dans les ruines de leurs villages n'ont reçu aucun secours, ou alors à dose homéopathique. Les hélicoptères, les camions et engins de génie de l'armée indienne ne sont pas là. Sans doute sont-ils mobilisés au Cachemire pour réprimer la guérilla locale et pour faire face aux forces pakistanaises. Mais pour les masses pauvres qui continuent de mourir dans le plus extrême dénuement, il n'y a rien ou presque.

La police est quand même intervenue rapidement quand des affamés ont tenté de s'emparer d'un entrepôt de produits céréaliers et les a dispersés en cognant dans le tas à coups de longs gourdins. Preuve que les forces de l'ordre savent être là rapidement quand elles l'estiment nécessaire.

Bien sûr on peut accuser la nature et la fatalité car les cyclones sont inévitables. On peut accuser l'impéritie de l'Etat indien, de son administration et de son armée, qui se soucient comme d'une guigne du sort des plus pauvres et qui ne sont pas gênés qu'ils meurent par milliers. En quoi la ressemblance avec l'incurie de l'Etat turc lors du tremblement de terre d'Izmit, et de bien d'autres Etats, est flagrante.

Mais il n'y a pas que cela.

Il y a quelques semaines, fin septembre, le cyclone Floyd a menacé la Floride, aux USA. Prévenus largement à l'avance, plusieurs millions de personnes avaient été évacuées. Cette évacuation ne s'est pas faite sans mal, il y a eu de gigantesques embouteillages, mais la population qui le souhaitait a pu partir de la zone menacée. On voit la différence entre un pays riche et un pays misérable.

En Inde, la population, même quand elle est prévenue ne sait où aller et n'en aurait pas les moyens, faute de transports. Ni voitures, ni trains, ni rien. Alors les habitants n'ont pu qu'attendre le cyclone, en espérant que les vents seraient cléments. Et à quoi bon rafistoler préventivement des demeures en torchis, en branchages et en tôles ? Faute de constructions suffisamment solides en dur, il est bien évident que tout ne demande qu'à s'envoler...

Seulement la misère, contrairement aux cyclones, n'est pas une fatalité. L'Inde (les masses pauvres devrait-on dire, car les riches s'en sortent) paye pour deux siècles de pillage colonial britannique (les Français auraient bien aimé en être, eux, les bénéficiaires, mais ils ont été évincés par les Anglais). Et même indépendante depuis un demi-siècle, l'Inde est restée dominée par l'impérialisme, relayé sur place par une bourgeoisie locale vorace, aussi impitoyables l'un que l'autre, entravant tout développement économique véritable qui aurait permis de sortir le sous-continent de la misère noire.

Alors les masses sont condamnées à mourir à chaque cyclone, à chaque tremblement de terre, à chaque coulée de boue ? Tant que l'impérialisme régnera sans partage sur la planète, les plus riches ne feront rien pour sauver les plus pauvres. La lutte contre les cyclones consiste évidemment à construire quand on peut des tumulus, des abris, des digues. Mais surtout à essayer d'en finir avec ce système responsable, en dernière analyse, d'un cortège sans fin de milliers, dizaines de milliers, millions de morts.

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