Autriche : Les élections législatives confirment la poussée de l'extrême droite08/10/19991999Journal/medias/journalnumero/images/1999/10/une-1630.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans le monde

Autriche : Les élections législatives confirment la poussée de l'extrême droite

En obtenant 27,22 % des voix aux élections législatives, le parti du milliardaire Jörg Haider, le FPÖ, Parti Libéral Autrichien, une étiquette passe-partout derrière laquelle on trouve un parti qui se situe nettement à l'extrême droite, vient de confirmer son succès de début d'année, aux élections régionales de Carinthie où il l'avait emporté avec plus de 42 % des voix.

Le FPÖ devient ainsi la deuxième force électorale en Autriche, juste derrière le Parti Socialiste (SPÖ), parti du chancelier Viktor Klima, qui n'obtient que 33,39 % des voix, tandis que la droite conservatrice (ÖVP), qui se retrouve troisième derrière le parti de Haider avec seulement 26,9 %, espère encore que d'ici la fin de la semaine, les votes des Autrichiens à l'étranger lui permettront de reprendre sa deuxième place. Enfin, les Verts progressent un peu et obtiennent 7,1 % des voix.

La progression électorale du Parti Libéral Autrichien a commencé en 1986. Haider a transformé un petit parti qui servait de refuge à d'anciens nazis en un parti à l'influence électorale grandissante : 9 %, puis 16 %, enfin 27 % aujourd'hui.

L'Autriche est confrontée aux mêmes problèmes que le reste de l'Europe. Même si le chômage est moins important que dans d'autres pays de l'Union européenne, la proximité des Balkans, et l'arrivée de réfugiés, conséquence des guerres successives au sud du pays, alimentent la xénophobie d'une fraction de l'opinion.

Un relatif plein emploi (le chômage y est officiellement de 4,5 %), et donc des cotisations sociales un peu plus abondantes n'ont pas empêché les deux grands partis traditionnels, sociaux-démocrates et conservateurs, qui gouvernent conjointement au sein de ce qu'on appelle une " grande coalition ", de mener la même politique de restrictions budgétaires qu'en France ; une politique qui frappe d'abord les plus déshérités puisqu'elle a pour fonction de favoriser les grandes entreprises et le monde des affaires. Dans la période récente, le chancelier socialiste s'est ainsi attaqué au système des retraites, notamment en alignant celles des fonctionnaires sur celles des salariés. Le dirigeant socialiste espérait peut-être faire de la surenchère sur un des aspects de la démagogie de Haider qui a l'habitude de s'en prendre, entre autres, aux privilèges des fonctionnaires. Il aura peut-être obtenu du coup le résultat inverse, que certains fonctionnaires lésés, électeurs traditionnels des sociaux-démocrates, donnent leur voix à Haider !

Comment une partie des électeurs ne seraient-ils pas aujourd'hui désorientés de voir la social-démocratie, qui avait autrefois contribué à mettre en place la protection sociale, la démanteler aujourd'hui. Restrictions budgétaires, remises en cause des acquis sociaux, immigration récente en provenance des Balkans ont constitué un terreau sur lequel la démagogie de Haider a trouvé prise. En effet, même si les statistiques indiquent que l'Autriche est un pays assez florissant, il n'empêche que 15 % des Autrichiens disposent d'un revenu inférieur de moitié au revenu moyen.

En revanche, pour asseoir sa carrière politique, Haider, qui cultive les apparences d'un riche playboy, bénéficie de gros moyens, à commencer par sa fortune personnelle qui provient pour partie de l'expropriation de Juifs, réalisée par son père, ex-nazi. Depuis le début de son ascension, Haider use d'une démagogie où l'on retrouve les ingrédients utilisés par Le Pen et Mégret, notamment sa propagande anti-immigrés.

La chute du Mur et l'ouverture de l'Europe de l'Est, puis l'entrée toute récente de l'Autriche dans l'Union européenne (1995), bien que le patronat autrichien ait su tirer avantage de l'une comme de l'autre, n'a apporté aucune amélioration à la population laborieuse. Mais Haider s'en sert pour faire vibrer la corde nationaliste. Il parvient d'autant mieux à user de sa démagogie qu'il n'a comme adversaires que deux partis politiques conjointement discrédités dans la cogestion de la crise au service des possédants.

Une ornière dont ces partis traditionnels ne semblent pas près de se sortir puisque, au vu des résultats, pour former son nouveau gouvernement, le chancelier Klima a le choix entre reconduire la même coalition, ou une variante de celle-ci : prendre des personnes supposées " compétentes " dans tous les partis parlementaires (sauf le FPÖ), des formules qui ont déjà fait leurs preuves... pour assurer la montée de l'extrême droite. Pire, sanction du succès de l'extrême droite, le chancelier en est maintenant à reprendre une partie de sa démagogie : le chancelier PS Klima vient de déclarer qu'il est " contre toute nouvelle immigration " !

Face à cette extrême droite, l'alliance de la gauche et de la droite parlementaires, dont c'est justement la politique commune qui a assuré le développement, reste une planche pourrie. Lui porter un véritable coup d'arrêt, seule la classe ouvrière peut le faire, à condition de ne pas laisser à des politiciens et à des partis qui se présentent comme ses représentants, parler et agir à sa place. A condition qu'elle intervienne sur le terrain politique, en menant une politique de classe. C'est la seule voie à prendre, si elle ne veut pas demain, avec l'approfondissement de la crise, subir la férule de Haider après avoir été trompée par la gauche et la droite traditionnelles.

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