La piste Tchetchène... et les autres17/09/19991999Journal/medias/journalnumero/images/1999/09/une-1627.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans le monde

La piste Tchetchène... et les autres

Les autorités russes n'ont pas attendu l'attentat du 13 septembre pour incriminer " le terrorisme qui a déclaré la guerre au peuple russe ", comme l'a déclaré Eltsine à la télévision. Le chef de guerre Bassaïev n'avait-il pas promis de faire payer à la Russie les bombardements au Daghestan et en Tchétchénie ?

Le soir même de l'attentat, la police affirma avoir identifié un suspect de " type caucasien ". Loujkov, maire de Moscou, prit moins de précautions oratoires pour réclamer " un cordon sanitaire autour de la Tchétchénie (car) la plupart de ceux qui en viennent sont liés aux bandits ".

Au passage, il rejeta la faute du retard de telles mesures sur le gouvernement. Eltsine venait, en effet, de lui ordonner d'assurer la sécurité dans la capitale sous 24 heures. Eltsine et Loujkov ne pouvaient laisser passer l'occasion de continuer leur propre guerre : Eltsine pour affaiblir celui qui brigue sa succession, Loujkov pour défendre son image de maire efficace et de candidat à la présidence.

Ceux qui ont commencé - ou plutôt, continué - à faire les frais de la situation, sont les nombreux Caucasiens des grandes villes, ces réfugiés de guerre, émigrés économiques ou simples résidents des métropoles russes que les autorités ne manquent jamais de désigner à la vindicte publique. Elles en ont fait les boucs émissaires de la peur qui s'est emparée de la population, la milice intensifiant son habituelle chasse au faciès.

Que les auteurs de ces attentats soient des islamistes tchétchènes est plausible. Même si Bassaïev et Khattab, qui en d'autres occasions avaient revendiqué haut et fort des " faits d'armes " de ce genre, ont démenti avoir organisé ces tueries. Mais ils peuvent mentir, ou avoir été doublés par des rivaux sur leur propre terrain.

Pourtant, une bonne partie de la presse russe évoque une autre hypothèse : celle d'attentats dont les commanditaires se trouveraient en Russie et visant à créer une situation de tension politique extrême.

Des rumeurs courent depuis des mois quant à une possible instauration de l'état d'urgence dans le pays, solution qu'envisagerait l'entourage d'Eltsine pour échapper à des échéances pouvant être catastrophiques pour lui, les élections législatives de décembre et présidentielle de l'an prochain.

Des commentateurs russes ont rappelé qu'en 1996, lors de la précédente élection présidentielle, Eltsine risquant de ne pas être réélu, avait éclaté une vague d'attentats attribués aux islamistes tchétchènes mais toujours pas élucidés. A l'époque, certains y avaient vu la main des services spéciaux du Kremlin. On a aussi entendu sur une radio française un membre du FSB (ex-KGB) expliquer que cet organisme pourrait être lié à ces attentats. Sur le terrain des sinistres manipulations politiques, le KGB a des traditions. En bonne compagnie, il est vrai : tous les services spéciaux du monde entier sont capables de " coups tordus ".

Alors, il est bien difficile de savoir qui a pu perpétrer ces attentats. Ne serait-ce que parce que ceux qui seraient susceptibles de commanditer de tels actes, ou de manipuler des individus prêts à les commettre, ne manquent pas et ne manquent pas de raisons pour cela : du sommet de l'Etat russe, avec ses clans rivaux, jusqu'à ceux qui rêvent d'instaurer une dictature islamiste dans telle ou telle région.

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