Leur société

Hollande à Craonne : cent ans de retard

Le 16 avril, François Hollande a assisté à la commémoration de la bataille, de la tuerie pour dire vrai, du Chemin des Dames, dans l’Aisne près de Craonne.

Le 16 avril 1917, il y a cent ans, le général Nivelle lançait une offensive d’ampleur destinée à reprendre le plateau de Californie aux troupes allemandes. Absurde, mal préparée, prétendant renverser le cours de la guerre et permettre son arrêt, elle fit de ce secteur un cimetière pour les soldats venus de Corse, du Pays basque et d’autres régions ainsi que de toute l’Afrique. 100 000 d’entre eux trouvèrent la mort en 15 jours.

Cette défaite, qui engendra des mutineries, a longtemps été occultée. Certains historiens et personnalités locales ont voulu qu’elle soit cette fois-ci au cœur des commémorations, saluer le courage des soldats et en finir avec l’opprobre jeté sur les condamnés à mort pour mutinerie. Six mille personnes ont assisté aux différents hommages. Nombre d’entre elles avaient un ancêtre au Chemin des Dames. La chanson de Craonne, chanson de l’époque longtemps interdite parce qu’elle dénonçait la guerre et appelait à une grève des soldats, a été entonnée pour la première fois devant un chef d’État. Hollande, au moins par sa présence, a donné une caution officielle à la réhabilitation des mutins. Quant à son discours, il y a bien dénoncé le nationalisme en général, mais pas le système qui l’a utilisé pour jeter les peuples dans cette boucherie et qui est prêt à le refaire aujourd’hui.

Il s’est naturellement trouvé des associations militaristes pour dénoncer la reprise de cette chanson au nom de l’honneur de l’armée française. Les généraux français n’ont pas changé depuis 1917, toujours prêts à la gloriole avec la peau des autres, toujours prêts à fusiller ceux qui refusent de marcher.

Mais Hollande, malgré son discours de compassion, ne vaut pas mieux. Venant verser une larme sur les martyrs un siècle après, il défend l’armée, les marchands de canons et le budget militaire aujourd’hui. La France, présidence Hollande comprise, n’a jamais cessé d’envoyer des soldats tuer et se faire tuer partout où les intérêts des capitalistes français sont en jeu.

Tant que les exploiteurs seront aux commandes de la société, la chanson de Craonne restera d’actualité, qui dit :

« Ceux qu’ont l’pognon, ceux-là r’viendront,

Car c’est pour eux qu’on crève.

Mais c’est fini, car les trouffions

Vont tous se mettre en grève.

Ce s’ra votre tour, messieurs les gros,

De monter sur l’plateau,

Car si vous voulez la guerre,

Payez-la de votre peau ! »

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