Italie : le référendum, une claque pour Renzi07/12/20162016Journal/medias/journalnumero/images/2016/12/2523.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Italie : le référendum, une claque pour Renzi

Avec près de 70 % de participation et une franche victoire du non, qui représente 60 % des votes, le référendum du dimanche 4 décembre a exprimé le rejet de la politique du gouvernement.

Car, s’il portait sur la réforme de la Constitution, il était voulu par Matteo Renzi, chef du gouvernement depuis trois ans, qui faisait du oui au référendum une condition pour rester à son poste… et qui a donc présenté sa démission au président de la République dès le lendemain matin.

Les électeurs étaient censés approuver la loi constitutionnelle de réforme du système parlementaire. Elle prévoit la fin de l’égalité des pouvoirs des deux Chambres, Assemblée et Sénat, la réduction du nombre de parlementaires et des coûts de fonctionnement des institutions. Ajouté à un mode de scrutin limitant la proportionnelle par de grosses primes au sortant, le projet vise à stabiliser les gouvernements et à favoriser l’adoption rapide des réformes. Une évolution qui n’est pas propre à l’Italie, mais souhaitée par la grande bourgeoisie, qui veut que sa politique soit menée à bien sans trop perdre de temps.

Qui mieux que Renzi pouvait incarner cette aspiration du grand capital ? Le champion de la modernité a réformé tambour battant, et chacune de ses réformes a été un coup supplémentaire contre les conditions d’existence des classes laborieuses. Version italienne de la loi travail, le Jobs Act, adopté en 2014 sous prétexte de lutter contre la précarité, l’a généralisée à l’ensemble du monde du travail. Les réformes de la fonction publique, la suppression des provinces, ont conduit à des suppressions d’emplois et à une dégradation de services publics déjà laminés dans de nombreuses régions du pays. Et la réforme cyniquement appelée « la bonne école » n’a permis de réembaucher qu’un nombre réduit d’enseignants par rapport à ceux licenciés auparavant, tout en donnant des pouvoirs de chef d’entreprise aux directeurs d’établissement scolaire.

Le résultat de cette politique, ce sont les classes populaires qui le vivent : d’après un récent rapport de l’Institut de recherche socio-économique italien (Censis), le revenu des foyers dont les parents ont moins de 35 ans se situe 15 % en dessous de la moyenne. Et les jeunes sont désormais plus pauvres que leurs parents et même que leurs grands-parents.

C’est dans les régions les plus touchées par le chômage que le non a fait recette. C’est le cas au sud de la Sardaigne, dans le Sulcis, où pèsent la fermeture des mines, celle du géant de l’aluminium Alcoa et de tous ses sous-traitants. Le taux de chômage y dépasse 50 % et atteint 78 % parmi les jeunes. Sur 127 000 habitants, 38 000 sont au chômage. « Ici, on tient avec les retraites de nos vieux. J’ai 28 ans, je n’ai jamais eu plus de trois jours de travail déclaré et maintenant mon père, ancien ouvrier de l’Alcoa, se bat pour ne pas finir au chômage lui aussi », a dit une jeune femme pour expliquer son non au référendum.

L’arrogant Renzi, méprisant tous ceux qui contestaient ses réformes, accusés d’antimodernité, a eu la mauvaise idée de lier son sort à celui de cette loi. « Il espérait un plébiscite, il a obtenu une condamnation à mort de sa politique », commentait un syndicaliste réjoui à l’annonce du verdict.

Du côté des tenants du non, de l’extrême droite à la gauche, en passant par le Mouvement 5 étoiles de Grillo, chacun cherche maintenant à s’approprier ce résultat et à revendiquer des élections le plus vite possible. Le Parti démocrate de Renzi, qui s’est déchiré pendant la campagne du référendum, va peut-être aller jusqu’à la scission, tandis que la Ligue xénophobe de Salvini et le parti Forza Italia du vieux Berlusconi cherchent un terrain d’entente pour une future coalition électorale, et que le M5S de Grillo se déclare prêt à gouverner.

Pas plus que ceux du oui, les soutiens du non ne représentent une solution contre le chômage de masse, contre la menace de tomber dans la misère qui pèse sur des centaines de milliers de familles ouvrières. Les travailleurs se trouvent face au même problème politique qu’avant le référendum : faire entendre leurs exigences et se donner les moyens de faire entendre leur propre voix, de mettre en avant les intérêts politiques et matériels des travailleurs.

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