Mitterrand et le PCF : un baiser qui tue… accepté avec délices26/10/20162016Journal/medias/journalnumero/images/2016/10/2517.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Mitterrand et le PCF : un baiser qui tue… accepté avec délices

Mercredi 26 octobre Hollande devait se rendre au Louvre commémorer le centenaire de la naissance de son prédécesseur et inspirateur, François Mitterrand. Cet anniversaire a été le prétexte à quelques opérations éditoriales, biographies, lettres, portraits intimes du défunt, etc. C’est aussi l’occasion pour Hollande de se raccrocher à une image de gauche. Mais de quoi et de qui parle-t-on exactement ?

Mitterrand a commencé sa carrière sous Pétain, l’a poursuivie sous la Quatrième république. Onze fois ministre, négociant ses appuis, se coulant dans tous les moules, il endossa toutes les politiques, y compris celle de la répression en Algérie, y compris celle des exécutions de militants algériens et français. Puis, en 1958, Mitterrand sortit du lot en refusant le retour de De Gaulle. C’était accepter d’être mis à l’écart pour mieux gagner le titre de premier opposant.

Cela lui permit de poser un deuxième jalon. En 1965, lors de la première élection présidentielle au suffrage universel, il réussit à se présenter en candidat unique de la gauche et à obtenir le soutien du PCF. Un tour de force pour un homme qui n’avait jamais été « de gauche » au sens le plus banal du terme, et dont l’anticommunisme était, comme pour tous les hommes politiques de son acabit, une seconde nature.

Mitterrand faisait dès cette époque le pari qu’on pouvait s’appuyer sur le PCF, ou plutôt sur ses électeurs, pour arriver au pouvoir. Il affirmait même que, non seulement cela ne favoriserait pas le PCF, mais que, au contraire, cela réduirait son influence. Le politicien avait chiffré la chose, parlant de faire passer l’électorat du PC de 25 à 5 % des voix.

Il a poursuivi cette politique, malgré quelques embardées, avec l’accord de la direction du PCF, jusqu’à son élection à la présidence en 1981. Alors, comme on enfonce un clou supplémentaire sur un cercueil, il prit soin d’appeler quatre ministres issus de ce parti. Il n’en avait pas besoin pour gouverner, le PS constituant à lui seul une large majorité. Il ne leur fit aucune concession, ce que d’ailleurs ils ne demandaient pas. Mitterrand avait besoin de ces ministres communistes pour lier un peu plus étroitement les organisations ouvrières à sa politique et, surtout, pour déconsidérer le PCF aux yeux des travailleurs, pour démoraliser les militants obligés de justifier une politique antiouvrière auprès de leurs camarades de travail. Depuis lors, malgré toutes ses contorsions, le PCF ne réussit pas à apparaître comme autre chose qu’un appendice du PS et donc comme coresponsable des coups portés au monde du travail.

La politique de Mitterrand au pouvoir n’a pas été différente de celle de ses prédécesseurs, de ses successeurs ou homologues des pays comparables. Il a mis en musique la partition nécessaire au grand patronat, voilà tout. Son seul titre d’originalité, comme homme politique de la bourgeoisie, est d’avoir été capable de réduire le PCF à la portion congrue.

Mitterrand n’en continuera pas moins, sans doute, à être qualifié d’homme de gauche, y compris par ce qui reste de la direction du PCF. Car Mitterrand n’avait pas eu besoin de mettre le pistolet sur la tempe ni de Waldeck-Rochet en 1965, ni de Georges Marchais à partir du 1972 pour qu’ils mettent l’influence de leur parti au service d’ambitions politiciennes. La direction du PCF voulait des ministres et pour cela était prête à encenser le politicien bourgeois qui acceptait de l’introduire au gouvernement. C’était aussi enterrer auprès de ses militants toute idée de faire aboutir les objectifs de la classe ouvrière par la lutte de classe. Tout le monde du travail en paye aujourd’hui la facture.

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