Dans le monde

Belgique : à Caterpillar, ils veulent enterrer les travailleurs vivants !

Vendredi 16 septembre, en solidarité avec les travailleurs de Caterpillar, 3 000 à 5 000 manifestants se sont retrouvés à Charleroi. À côté de beaucoup de travailleurs de Caterpillar et de sous-traitants, des délégations syndicales d’autres grandes entreprises étaient venues, dont une forte délégation CGT de Caterpillar de Grenoble où une partie de l’activité de Charleroi serait transférée. Un geste de solidarité internationale fort remarqué et apprécié.

Des grandes entreprises de la région, ce n’étaient pas seulement les délégués syndicaux qui s’étaient déplacés, des groupes de travailleurs de la Sonaca, d’Aperam, d’Industeel et bien d’autres avaient tenu à être présents, beaucoup de travailleurs se rendant compte que de semblables menaces pèsent sur toute la classe ouvrière.

À part les traditionnels pétards lancés dans un tunnel, le cortège était cependant très silencieux. Depuis l’annonce de fermeture, il y a deux semaines, la production était à l’arrêt. Il n’était pas pensable de faire tourner l’usine normalement. Mais il ne s’agissait pas de grève. Les syndicats avaient en effet appelé tout le monde à se présenter normalement au travail « afin de respecter leurs contrats de travail », soi-disant pour ne pas donner le prétexte à Caterpillar de procéder à des licenciements pour faute grave, et donc se priver, selon les syndicats, des indemnités qui seront négociées dans les mois à venir dans le plan social. Sous prétexte de ménager les forces pour une « lutte longue », aucune action n’était prévue.

Les travailleurs dans le cortège venaient donc de passer deux semaines à tuer le temps et à ressasser ces menaces. Il y a eu peu d’assemblées et c’était surtout pour entendre des appels à rester calmes et dignes, d’éviter la casse. Ce ne sont pourtant pas les travailleurs les casseurs, ce sont les patrons qui cassent les entreprises.

De dignité, il était aussi beaucoup question dans les discours tenus par les dirigeants syndicaux à la fin du cortège. Antonio Cocciolo, ancien délégué de Caterpillar à la réputation combative, aujourd’hui président de la FGTB Charleroi-Sud Hainaut (le syndicat socialiste), a décrit longuement les répercussions catastrophiques que signifient la disparition des 2 000 emplois de Caterpillar, plus celle des 3 000 emplois des sous-traitants pour la région.

Il a certes affirmé que la FGTB n’accepte pas la fermeture. Mais pour ce qui est de la lutte, il a surtout parlé des luttes du passé. Celles-ci auraient marqué la population de la région, lui donnant des traits de caractère particuliers, en en faisant des gens à part. Une façon comme une autre d’isoler les travailleurs de ceux des autres régions où les licenciements ne manquent pourtant pas non plus, des milliers de suppressions de postes ayant été annoncés depuis la fin des vacances dans l’ensemble du pays.

Quant à la lutte d’aujourd’hui, les dirigeants syndicaux se sont limités à des pseudo-menaces face au monde politique : « On a entendu vos promesses », « on vous tient à l’œil », « ce n’est pas parce que nous n’avons pas encore démarré la lutte que nous ne lutterons pas demain ». Mais qu’est-ce que les politiciens et surtout le PS au gouvernement en Wallonie ont promis exactement ? Certes, dans les jours qui ont suivi l’annonce, ils ont même parlé de réquisition. Mais derrière cet accès de radicalisation verbale, ils ne défendent que l’éternelle perspective de trouver un très hypothétique exploiteur de remplacement, à coup de cadeaux s’entend. Comme à Liège (ArcelorMittal), comme à Genk (Ford), cette perspective, surtout sans rapport de force, ne promet aux travailleurs que du chômage ainsi que des conditions de travail et des salaires dégradés pour ceux qui restent.

Lundi 19 septembre, la production a été redémarrée avec la bénédiction des syndicats. Mais il n’est nullement dit que les travailleurs se laissent ainsi enterrer vivants tellement la situation est révoltante. Pour la lutte qui est nécessaire, ils ne peuvent compter que sur leur propre force. Leurs alliés potentiels sont les travailleurs des autres entreprises. Certainement pas les politiciens gouvernementaux ou les directions syndicales.

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