Paralympiques 2012 : la médaille d'or de l'hypocrisie pour les organisateurs

05 Septembre 2012

Quiconque a assisté à des épreuves des Paralympiques de Londres, qui doivent prendre fin le 9 septembre, n'a pu qu'être impressionné, tant par les prouesses et le courage des participants que par la sophistication des aides techniques dont certains disposaient -- aides qui pourraient améliorer considérablement la qualité de vie de très nombreux handicapés, si seulement la société leur permettait d'y avoir accès. Ceci étant évidemment une affaire de gros sous.

Mais cela, c'était le visage public de ces jeux. Car derrière, se cachait une hypocrisie qui frisait l'abject à bien des égards. Deux exemples suffiront à l'illustrer.

Tout au long de ces jeux, les médias et politiciens britanniques se sont relayés pour souligner les performances (réelles d'ailleurs) d'anciens soldats britanniques en Afghanistan, revenus de cette guerre avec une jambe ou deux en moins, parfois pire. Mais par la même occasion était distillée une propagande écoeurante vantant l'occupation britannique en Afghanistan, qui n'est toujours pas terminée. Comme si les ex-soldats handicapés qui participaient à ces jeux n'auraient pas préféré, tout comme leurs camarades, rester entiers et ne pas être envoyés sur ces champs de bataille meurtriers pour le seul profit de l'ordre impérialiste !

Un autre exemple, sur un tout autre plan, était celui du principal sponsor de ces jeux, la société française Atos. C'est une multinationale spécialisée en services technologiques de tous ordres, allant de l'informatique à la médecine, surtout connue en France comme numéro un du paiement en ligne et de la fourniture de services bureautiques aux administrations publiques.

En Grande-Bretagne, en revanche, Atos est surtout connue pour le contrat de 150 millions d'euros par an qu'elle a avec l'État depuis le dernier gouvernement travailliste pour contrôler l'« aptitude au travail » des handicapés et travailleurs en longue maladie recevant des allocations sociales à ce titre. Bien qu'appuyés par une virulente campagne dans la presse présentant les handicapés comme des « tricheurs qui profitent du système », ces contrôles ont quand même fini par faire scandale.

Car il faut vraiment être quasiment grabataire pour que les médecins d'Atos ne vous reconnaissent pas valide. Du coup, les soi-disant « valides » perdent leur allocation de longue maladie ou d'invalidité et se retrouvent face à un marché du travail où il n'y a pas de place pour eux, survivant sur des allocations chômage qui vont en diminuant. Et tant pis si, du fait de leur condition physique, ils ont des frais supplémentaires. Ils n'auront aucune aide.

C'est ainsi que des malades atteints de cancers généralisés se sont trouvés privés en fin de vie d'une grande partie de leurs ressources. Une enquête sociale a révélé que 1 100 personnes déclarées aptes au travail par Atos au cours des neuf premiers mois de l'année 2011 étaient mortes durant la même période !

Il ne faut donc pas s'étonner si de nombreuses manifestations d'associations d'handicapés ont marqué ces jeux Paralympiques -- bien que la presse n'en ait pas dit grand-chose. On comprend aussi que les membres de l'équipe paralympique britannique aient fait -- avec raison !-- le geste de ne pas arborer le badge d'Atos qu'ils étaient censés porter.

François ROULEAU