Discours sur la « croissance » : Choeur européen et voix discordantes23/05/20122012Journal/medias/journalnumero/images/2012/05/une2286.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Discours sur la « croissance » : Choeur européen et voix discordantes

Une fois de plus Hollande, Merkel et les autres chefs d'État et de gouvernement européens devaient se réunir mercredi 23 mai, en vue de préparer la « vraie » réunion en juin. Une fois de plus, il s'agissait de sauver la zone euro. Une fois de plus, la seule solution envisagée était de verser de l'argent aux capitalistes et de faire des économies sur le dos des travailleurs. Seule nouveauté, les États se sont mis d'accord pour dégager 230 millions d'euros afin d'amorcer la pompe des « grands projets » ou « grands travaux », et d'inciter les investisseurs à avoir confiance dans la « croissance ».

Pendant quatre ans, chaque discours de ministre de l'Économie était ponctué d'un « Il faut rassurer les marchés ». Depuis quatre semaines, cette phrase a été remplacée par « Il faut retrouver de la croissance ». Mais cela revient au même.

La recherche de la « croissance » n'est qu'une autre façon de favoriser les profits patronaux. Au lieu de laisser simplement les banques aller au guichet de la banque centrale européenne et chaque État subventionner ses propres capitalistes, les dirigeants européens voudraient maintenant procéder par « grands projets ». Des projets qui ne sont nullement motivés par la recherche de la satisfaction des besoins de la population.

La concrétisation risque d'être délicate. Chaque État défendant ses propres capitalistes, à qui l'Europe confiera-t-elle les projets ? Les marchandages promettent d'être âpres.

Et, avant même qu'ils ne soient attribués, qui financera ces grands projets ? Il faudrait pour cela que l'Europe se dote d'un fonds d'investissement spécial, abondé par la vente d' « eurobonds », autrement dits d'emprunts placés par les banques, et garantis collectivement par tous les États. Mais cette garantie « collective » serait en fait surtout celle de l'État le plus riche et aux finances aujourd'hui les plus saines, l'Allemagne, laquelle se fait évidemment tirer l'oreille.

Alors, en admettant que Hollande et les autres convainquent Merkel de verser un peu plus au pot, en admettant aussi que les arbitrages entre trusts de l'industrie et du bâtiment se concrétisent, en admettant que les grands projets voient le jour, qu'est-ce que ça changerait pour les travailleurs d'Europe ?

D'abord, comme prennent bien soin de le préciser Hollande et consorts, l'austérité resterait de mise pour les travailleurs et les économies sur les services publics continueraient comme avant, car il faut avant tout « redresser les comptes ». Et puis, sur un milliard versé pour un « grand projet », combien serait dilapidé pour aller dans les poches des divers intermédiaires, combien en profits pour les industriels, combien en rente pour les banquiers et quelle minime partie versée en salaires finirait par revenir à l'économie réelle et à la satisfaction des besoins des travailleurs ?

De plus, les gouvernements se heurteront toujours au même obstacle : qu'est-ce qui pourrait bien contraindre un capitaliste à investir dans un grand projet, s'il peut gagner plus et plus vite dans la spéculation ? La seule incitation envisagée par Hollande et Merkel consiste à garantir les profits des investisseurs. Autant leur signer directement un chèque en blanc.

Enfin, de quels grands projets parle-t-on ? Une seule chose est garantie d'avance : la population n'aura pas à dire son mot sur le choix. Il serait pourtant évident : garantir à tous les travailleurs du continent un emploi et un salaire décent, quitte à prendre sur les profits des capitalistes, voire en les expropriant.

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