Prix du carburant : Total et les sociétés du CAC 40 décident, les ministres n'ont qu'à filer doux13/07/20112011Journal/medias/journalnumero/images/2011/07/une2241.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Editorial

Prix du carburant : Total et les sociétés du CAC 40 décident, les ministres n'ont qu'à filer doux

Il y a à peine trois semaines le gouvernement demandait aux compagnies pétrolières, en fait pour la France à Total, de faire un effort pour faire baisser le prix des carburants à la veille des premiers grands départs en vacances. Il avait lui-même fait un geste pour y contribuer en déstockant une partie des réserves dont l'État dispose pour faire face aux imprévus. Les prix à la pompe diminuèrent pendant deux, trois jours, de si peu que les automobilistes n'eurent guère l'occasion de le constater. Mais il n'a pas fallu longtemps pour que le PDG de Total en personne annonce publiquement que les prix des carburants allaient augmenter dans les jours qui viennent. Façon de montrer que les discours et les promesses des gouvernements ne valent pas grand-chose, et que les vrais maîtres des décisions, ce sont eux, ces grands patrons des sociétés du CAC 40.

Le PDG de Total essaie de nous convaincre que les augmentations à la pompe ne sont pas de sa faute, mais de celle des « marchés ». Comme si des compagnies comme la sienne étaient impuissantes face à ces marchés ! Mais les marchés, c'est qui, sinon ces grands groupes ? Ils y font la loi, y spéculent, faisant varier par leurs interventions, les cours des produits, et y gagnant des fortunes.

De toute façon, il y aurait un moyen tout simple pour Total de faire baisser les prix, ce serait d'accepter de réduire ses énormes marges bénéficiaires. Elles se sont élevées à plus de dix milliards en 2010. Et pour 2011, on parle de trois milliards rien que pour le premier trimestre. Sans oublier que ces profits annuels se cumulent d'année en année, et que globalement les sommes récupérées par les actionnaires de ce groupe atteignent, au fil des ans, des centaines de milliards d'euros. Total et ses congénères du CAC 40 n'ont pas à se plaindre de la situation malgré la crise et, pour certains, grâce à la crise.

D'autant qu'un rapport tout récemment rendu public, présenté par un député UMP donc peu suspect de partialité, rappelle que les sociétés du CAC 40 paient nettement moins d'impôts que les petites et les très petites entreprises. Les très grandes paieraient en moyenne autour de 18 % d'impôts alors que les petites et moyennes entreprises (PME) et les très petites (commerçants, artisans) en paieraient autour de 39 %. Et parmi les plus importantes, quatre, dont Total, n'en paieraient quasiment pas en France.

Pourquoi de telles inégalités ? C'est que l'accumulation des niches fiscales, des exonérations mises en place par les gouvernements successifs permettent aux plus grandes sociétés, disposant des services de comptables et de fiscalistes performants, de bénéficier au mieux des avantages fiscaux, privilèges qui reposent sur des lois, des décrets, initiés par les majorités parlementaires successives. De gauche ou de droite, elles ont légiféré au service des plus riches.

Xavier Bertrand s'époumone à crier qu'il faudrait que les compagnies pétrolières fassent preuve de plus de transparence. Celles-ci, par la bouche du PDG de Total, Christophe de Margerie, font savoir que ce n'est pas le gouvernement qui est le vrai patron de l'économie. Ceux qui commandent, ce sont les actionnaires des sociétés du CAC 40, les ministres et le gouvernement n'étant que leurs serviteurs appointés.

« Plus de transparence », réclame Xavier Bertrand ? Mais de qui se moque-t-il, qui croit-il tromper ? Ce qui se passe dans les coulisses de ces grandes sociétés, les gouvernements pourraient facilement le savoir s'ils en avaient la volonté. Mais ils s'y refusent, pour la bonne raison qu'ils ne veulent absolument pas gendarmer ces grands patrons.

Pourtant, un tel contrôle serait nécessaire. Plus même, il serait urgent de mettre un terme aux agissements de ces grands industriels et financiers qui font ce que bon leur semble, quitte à entraîner l'économie à la catastrophe, et la majorité de la population dans le dénuement.

Oui, nous devons prendre conscience qu'il y a encore des privilèges à abolir, des bastilles à abattre. Le comportement arrogant du PDG de Total est là pour nous le rappeler en cette veille de 14 juillet.

Éditorial des bulletins d'entreprise du 11 juillet

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