Dans le monde

Syrie : La répression sanctionnée

La population en lutte ne doit compter que sur elle-même

Lundi 9 mai, près de deux mois après les débuts de la répression contre la population syrienne qui, à ce jour, aurait tué entre 600 et 700 manifestants et conduit à l'arrestation d'au moins 8 000 personnes, les États-Unis et l'Union européenne ont décidé de sanctions économiques contre le pouvoir syrien. Elles s'accompagnent d'un embargo sur les livraisons d'armes et de matériel répressif destinés à l'État syrien.

Les sanctions visent les avoirs et les déplacements de treize dignitaires du régime, jugés « très impliqués » dans la répression qui frappe ceux qui manifestent contre la dictature de Bachar Al-Assad. En tête, on trouve le frère cadet du président, Maher, désigné comme le principal maître d'oeuvre de la répression. Suivent ensuite le chef des Renseignements généraux Ali Mamlouk, le ministre de l'Intérieur nommé fin avril, Mohammad Ibrahim Al-Chaar, et les chefs de la sécurité politique, du renseignement militaire et du renseignement militaire de l'armée de l'air.

Il manque cependant dans la liste des sanctionnés Bachar lui-même, pourtant le principal responsable d'une répression qui, vendredi 6 mai encore, a frappé sauvagement, à Damas, Homs et Banyas notamment. Les États-Unis ont indiqué que les sanctions pourraient le frapper à son tour si la répression se poursuivait.

Une conseillère de Bachar Al-Assad, Bouthaina Chaabane, a déclaré au New York Times que « le moment le plus dangereux est derrière nous ». Mais en réalité la dictature syrienne continue, sur place, de justifier sa répression par la chasse à de prétendus « groupes terroristes qui ont semé la terreur contre la population civile ». Ce mensonge autorise les forces de police à perquisitionner, réprimer, arrêter et tuer impunément les manifestants.

Ainsi à Banyas, vendredi 6 mai, selon un observatoire londonien des droits de l'homme en Syrie, des milliers de personnes ont été parquées dans le stade municipal pour y être interrogées et frappées par la police. Mais dès lundi 9 mai, dans la même ville, des centaines de manifestants exigeaient dans la rue la libération des personnes appréhendées.

Et c'est bien ce qui est marquant dans la situation présente en Syrie. Depuis deux mois, le régime ne cesse de réprimer les manifestants dans tout le pays sans parvenir à arrêter la contestation. Au contraire même, plus il réprime, plus il semble donner aux manifestants la force de continuer de le défier dans la rue.

C'est d'ailleurs pourquoi les grandes puissances, qui depuis deux mois laissaient faire le dictateur, prennent aujourd'hui quelque distance avec les sanctions. Après toutes leurs belles paroles sur la démocratie dans les pays arabes, elles ne peuvent maintenant faire moins, alors qu'en réalité elles ne souhaitent pas la chute du régime.

Les travailleurs et les masses populaires de Syrie, comme d'ailleurs du reste du monde arabe, n'ont en fait rien à attendre de ces grandes puissances. Jusqu'à présent, celles-ci se sont fort bien accommodées du régime syrien, aussi dictatorial soit-il, car il participait au maintien de la stabilité dans la région.

La population syrienne en lutte ne peut compter que sur sa propre détermination, et visiblement elle n'en manque pas.

Jacques FONTENOY

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