Attaques antiouvrières et antisyndicales - Les manifestations populaires de Madison : Un encouragement pour l'avenir16/03/20112011Journal/medias/journalnumero/images/2011/03/une-2224.gif.445x577_q85_box-0%2C9%2C172%2C231_crop_detail.png

États-Unis

Attaques antiouvrières et antisyndicales - Les manifestations populaires de Madison : Un encouragement pour l'avenir

Dans l'État du Wisconsin, le bras de fer entre le gouverneur et les élus républicains d'un côté, et de l'autre les syndicats appuyés par le Parti Démocrate et ses élus, a pris fin au bout de trois semaines.

Le gouverneur a finalement réussi à faire adopter l'essentiel de son projet de loi, qui comprend à la fois de sévères sacrifices financiers pour les employés des administrations et services publics et une attaque frontale contre leurs organisations syndicales.

Ce conflit et ses multiples péripéties ont fait la une de l'actualité nationale pendant des semaines. Les 14 sénateurs démocrates de l'État se sont réfugiés depuis le 17 février dans l'État voisin de l'Illinois, pour empêcher le Sénat du Wisconsin de siéger avec le quorum requis. Une astuce a finalement permis au gouverneur de se passer du quorum pour faire adopter par le Sénat, en l'absence des élus démocrates, ces attaques contre les salariés et leur syndicat.

UNE ATTAQUE EN REGLE CONTRE LES SALAIRES ET LES DROITS SYNDICAUX

Sous prétexte d'économies afin de réduire le déficit budgétaire, ce sont les employés du secteur public qui verront leur salaire amputé de près de 6 % pour financer leur retraite, tandis que les primes qu'ils payent pour leur assurance maladie seront carrément doublées. Quant aux syndicats de la fonction publique, ils ne pourront négocier que sur les salaires - à condition que les augmentations réclamées ne dépassent pas celle de l'indice officiel des prix - et ils n'auront plus leur mot à dire sur les conditions de travail, les horaires, les avantages sociaux, etc. Leur représentativité sera réexaminée tous les ans. Les employeurs ne déduiront plus automatiquement les cotisations syndicales sur les payes pour les reverser aux syndicats : il faudra que chaque salarié choisisse de se syndiquer et de payer lui-même sa cotisation au syndicat. Il s'agit d'une attaque en règle contre les appareils syndicaux du secteur public (à l'exception des syndicats de policiers et de pompiers) et de leurs finances. Les élus démocrates se sont sentis directement visés eux aussi, car ce sont les militants syndicaux et les finances des syndicats qui sont mis à contribution pour leurs campagnes électorales et à qui ils doivent leur élection.

LES TRAVAILLEURS REPONDENT A L'APPEL... MAIS LES DIRIGEANTS LES VENDENT

Face à cette attaque en règle, dirigeants syndicaux et appareil du Parti Démocrate ont appelé à manifester et des dizaines de milliers de personnes ont répondu à l'appel : le Parlement du Wisconsin a été occupé jour et nuit pendant deux semaines et des manifestations de dizaines de milliers d'employés, d'enseignants, d'étudiants, se sont déroulées chaque week-end dans la capitale, Madison. Samedi 12 mars, alors que la loi venait d'être adoptée, les manifestants étaient encore plus nombreux, rejoints par quelques dizaines de fermiers sur leurs tracteurs, inquiets de toutes des coupes dans les budgets sociaux. Ce sont près de 100 000 personnes qui ont fait entendre leur colère.

Mais les chefs syndicaux et les responsables démocrates ont voulu placer dès le début la protestation sur le terrain exclusif de la défense des droits syndicaux, en déclarant qu'ils étaient prêts à accepter tous les sacrifices imposés aux salariés du public, à condition que le gouverneur retire les clauses antisyndicales de son projet de loi. Et s'ils ont appelé à des manifestations similaires dans d'autres États où des législations semblables ont été adoptées, ou encore à des manifestations de solidarité dans des dizaines d'autres États, jamais ils n'ont appelé les travailleurs à se défendre contre les sacrifices que les gouvernants et les patrons leur font subir. En somme, il fallait que les syndiqués défendent le droit des syndicats à approuver les sacrifices et les attaques contre les travailleurs. Dans ces conditions, les dirigeants syndicaux ne mettaient pas tous les atouts de leur côté pour sortir victorieux du conflit.

Il reste que la mobilisation qui a eu lieu dans le Wisconsin a montré aux travailleurs de tout le pays que des dizaines de milliers des leurs peuvent se dresser ensemble pour se défendre. Et si l'attitude des élus démocrates et des chefs syndicaux, prêts à vendre les travailleurs pour sauver leurs intérêts d'appareils, a été mise sous le feu des projecteurs et a permis à une partie de la classe ouvrière de comprendre que ce n'est pas sur eux qu'il faudra compter pour se défendre, mais bien sur la force et la solidarité des travailleurs eux-mêmes, ce sera un acquis précieux pour les combats qui ne manqueront pas de venir.

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