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Grande-Bretagne : Campagne pour les élections du 6 mai - toujours plus d'austérité !

Après treize années de gouvernement travailliste, les élections du 6 mai prochain vont peut-être renouveler les têtes au gouvernement, mais certainement pas la politique mise en ouvre.

Pour tenter d'enrayer la hausse de l'abstention qui s'est manifestée lors des dernières élections (40 % en 2005), les trois grands partis - travailliste, conservateur et libéral-démocrate - se sont entendus pour mener une campagne à l'américaine, dans laquelle les femmes des postulants au poste de Premier ministre sont propulsées sur le devant de la scène. Et, pour la première fois en Grande-Bretagne, les trois leaders se feront face dans des débats télévisés. Pour faire bonne mesure, le leader travailliste Gordon Brown et son rival conservateur David Cameron ont embauché comme directeur de campagne un ancien membre de l'équipe présidentielle d'Obama.

Le recul des voix travaillistes est quasi certain, après deux ans de crise où le gouvernement Brown a servi si ouvertement de pilier au grand capital. Mais le système électoral britannique (scrutin majoritaire à un tour) rend le scrutin incertain. S'il reflète les nombreux sondages des deux derniers mois, il se peut que, pour la première fois depuis près de quarante ans, ni les travaillistes ni les conservateurs n'aient une majorité absolue au Parlement.

Aussi les deux partis font-ils feu de tout bois pour mobiliser leur électorat. Les travaillistes brandissent le « risque de troubles sociaux » si le futur gouvernement, au moment où il mettra en ouvre les mesures d'austérité que tous les partis ont dans leurs cartons, apparaît minoritaire dans l'électorat. Les conservateurs cherchent à ratisser sur leur droite en mobilisant le gratin du grand patronat pour signer une pétition en leur faveur, ou encore par des dérives calculées contre l'Europe et l'immigration. Quant au Parti libéral-démocrate, il s'efforce de renforcer sa position d'arbitre potentiel en débordant les travaillistes à la fois sur leur gauche et sur leur droite, dans l'espoir de prendre des voix à ses deux rivaux.

Pour la classe ouvrière, il n'y aucun enjeu dans cette élection. Lors du premier des trois débats télévisés organisés entre les trois grands partis, sur la chaîne ITV, ils ont étalé le peu de chose qui les sépare. Cela fait six mois qu'ils martèlent avec une belle unanimité la « nécessité » de réduire le déficit budgétaire creusé par le sauvetage de la finance, aujourd'hui estimé à plus de 12 % du PIB (équivalant à celui de la Grèce). En dehors de nuances, ils entendent tous le faire par une réduction brutale des budgets sociaux et par des suppressions massives d'emplois dans le secteur public. Bien sûr, ils se gardent bien de chiffrer leurs intentions. Mais les commentateurs estiment, sur la base des prévisions du budget de mars, que ces suppressions d'emplois pourraient atteindre le chiffre de 500 000 dans les cinq ans à venir, soit près de 10 % du secteur public.

De ce point de vue, les travaillistes ont déjà lancé le processus, par des suppressions d'emplois dans la fonction publique et la poste. Ces dernières semaines, une nouvelle charrette de 30 000 suppressions d'emplois a reçu, de fait, le soutien des syndicats dans le cadre d'un nouvel accord de « modernisation » de la poste. Chez Network Rail, entreprise publique qui assure la gestion du réseau ferré pour le compte des compagnies de train privées, grâce aux subsides de l'État, les mesures d'austérité sont en train de faire des ravages. Non seulement 1 500 emplois sont en cours de suppression dans la maintenance des voies, mais une réduction des projets de rénovation des rails vient d'entraîner la faillite d'un sous-traitant et le chômage pour ses 2 000 ouvriers. Et cela, alors même que le réseau ferré reste l'un des plus délabrés d'Europe !

La classe ouvrière, qui a déjà eu un avant-goût de l'austérité à venir sous les travaillistes, peut s'attendre à ce que le nouveau gouvernement, quel qu'il soit, poursuive cette politique d'austérité visant à lui faire payer la crise. À moins, bien sûr, qu'à force de tendre la corde celle-ci se casse, et que la colère de bien des travailleurs, rentrée depuis si longtemps, finisse par exploser.

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