Bas salaires : Le gouvernement bricole... pour ne pas faire payer les patrons !12/01/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/01/une-1696.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

Bas salaires : Le gouvernement bricole... pour ne pas faire payer les patrons !

Le gouvernement a été placé dans une situation d'autant plus inconfortable par la décision du Conseil constitutionnel de refuser la baisse de la CSG sur les bas salaires que cela met en lumière toute l'hypocrisie de sa politique.

La mesure elle-même, qui permettait à plus de neuf millions de salariés, gagnant jusqu'à 1,4 fois le SMIC, de se voir royalement octroyer 180 F par mois était déjà bien dérisoire, d'autant que le gouvernement accordait des ristournes après avoir à la fois généralisé l'assiette de la CSG et fortement augmenté son taux. La CSG, qui n'est pas un impôt progressif, est de toute façon lourdement supportée par la majorité la moins riche de la population. Et il est assez hypocrite de la part du gouvernement de faire mine de faire du social après avoir eu le culot d'étendre la CSG à tous les revenus, y compris les plus bas !

Que dire d'ailleurs de la décision du Conseil constitutionnel qui a trouvé injuste cette minable ristourne au nom de «l'égalité devant l'impôt» ! Et cela au moment où la baisse du taux d'imposition des sociétés et des tranches de revenus les plus hautes prévue par Fabius représente, pour les entreprises comme pour les particuliers, des cadeaux bien supérieurs à 180 F par mois !

Cette différence de traitement est tellement indécente que le gouvernement se doit de faire un geste vis-à-vis des bas revenus au moment où l'on va entrer en période électorale. C'est bien pour cela qu'il lui faut se décider vite.

Mais les discussions autour des solutions de rechange envisagées sont tout aussi édifiantes !

Une augmentation du SMIC avait, paraît-il, la faveur de la ministre de l'Emploi Elizabeth Guigou, à condition bien sûr que cette augmentation soit compensée par un nouvel allégement des cotisations sociales patronales, comme si les cotisations patronales sur les bas salaires n'avaient pas déjà été réduites d'une façon indécente qui incite les patrons à payer le moins possible les travailleurs qu'ils emploient. L'augmentation envisagée était pourtant fort modeste, autour de 2,4 % ! Robert Hue plaidait, lui, pour un coup de pouce de 3,2 %, ce qui ne va pas bien loin non plus : 180 F par mois pour les travailleurs qui ont un emploi à plein temps payé au SMIC.

Pour ceux qui sont payés avec des demis ou des quarts de SMIC, le cadeau serait proportionnel. Quant à ceux qui touchent un peu plus que le SMIC - ils sont quelque 6,5 millions - ils risquent fort de ne rien toucher du tout car, comme les services même du ministère des Finances l'évoquent, les patrons, qui ne sont pas obligés d'augmenter les salaires, peuvent empocher les réductions de charges et... ne pas les répercuter sur les salaires. Si bien que la crainte majeure du gouvernement est qu'une hausse du SMIC ne déclenche une série de revendications salariales...

Aux dernières nouvelles, après avoir écarté l'option d'une augmentation du SMIC, le gouvernement socialiste choisirait l'option du crédit d'impôt, qui a la faveur aussi bien de Fabius que de Chirac. En effet le ministre des Finances Fabius envisageait un remboursement en fin d'année par le fisc de la CSG sur les bas salaires, en tenant compte des situations familiales. Et Chirac s'est dit carrément favorable au crédit d'impôt qui permettrait plus généralement à l'Etat de compenser la faiblesse des salaires, le fisc versant ainsi un revenu complémentaire à ceux qui sont trop mal payés. Cette idée est dans l'air depuis déjà un certain temps et a évidemment le soutien du patronat qui espère ainsi trouver facilement à embaucher tout en payant des salaires dérisoires.

Bref le gouvernement, à la recherche d'un petit geste en direction de l'électorat populaire en cette période électorale, s'oriente vers un geste qui ne lui coûte pas trop cher et surtout qui ne coûte rien au patronat voire qui l'avantage aussi une fois de plus.

Ce n'est évidemment pas cela qui permettra aux quelque neuf millions de travailleurs qui ne touchent que de petits salaires, et encore moins aux retraités, de vivre mieux ; ni aux six millions de personnes qui vivent avec les minima sociaux de sortir de la misère. Non, pour cela ce sont de tout autres mesures qu'il faudrait prendre. Il faudrait augmenter de 1 500 à 2 000 F, non seulement le SMIC mais tous les salaires, retraites et pensions, il faudrait relever de même tous les minima sociaux. Il faudrait supprimer les impôts indirects et tous ceux qui ne sont pas progressifs et à la place taxer fortement les hauts revenus, les grandes fortunes, et les profits.

Evidemment on est loin là du bricolage dont va laborieusement accoucher le gouvernement : destiné à donner le change au moment de solliciter les électeurs, il ne diminuera en rien la pauvreté qui, malgré l'auto-satisfaction du gouvernement concernant les chiffres du chômage, n'a pas reculé ces dernières années.

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